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Par : piwi
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mercredi 27 Déc, 2023
Catégorie : Economie

Pilier de l’économie ukrainienne, la métallurgie pâtit de la guerre

L’industrie métallurgique d’Ukraine, pilier de l’économie ukrainienne depuis la chute de l’Union soviétique, a fait les frais des bombardements russes et du blocus en mer Noire.

Usine sidérurgique d'ArcelorMittal dans le sud de l'Ukraine. Avant la guerre, le pays se classait au huitième rang mondial des pays producteurs de fer et d'acier et au troisième rang des pays exportateurs.
Usine sidérurgique d’ArcelorMittal dans le sud de l’Ukraine. Avant la guerre, le pays se classait au huitième rang mondial des pays producteurs de fer et d’acier et au troisième rang des pays exportateurs. (Roman PILIPEY/AFP)

Par Guillaume Ptak LES ECHOS 

Après près de deux ans de guerre de haute intensité, certains pans de l’économie ukrainienne font preuve, à l’image du secteur bancaire , d’une résilience inattendue. D’autres, tels que l’industrie métallurgique, accusent le poids de l’invasion – et des destructions massives qu’elle a occasionnées.

Une situation d’autant plus alarmante que le secteur représentait avant guerre un véritable pilier de l’économie de l’Ukraine. « L’industrie métallurgique génère environ 10 % du PIB et plus de 30 % des recettes d’exportation, explique Viktoriia Ahapova, docteure en économie et analyste à Vox Ukraine.

Devises et recettes fiscales

Il y a quelques années, l’Ukraine se classait au huitième rang mondial des pays producteurs de fer et d’acier et au troisième rang des exportateurs. L’industrie sidérurgique ukrainienne représentait à elle seule environ 2 % de la production mondiale d’acier brut.

« Avant la guerre, l’industrie minière et métallurgique représentait 15 à 17 % de la production industrielle de l’Ukraine, explique Oleksandr Riabko, secrétaire général du syndicat des métallurgistes et mineurs d’Ukraine. Les exportations constituaient une source essentielle de devises étrangères et, bien sûr, l’industrie versait d’importantes recettes fiscales au budget de l’Etat. »

Usines capturées

Mais le début de la guerre dans le Donbass en 2014 et la capture d’une partie de la région par les forces russes a porté un coup aux performances du secteur. L’essentiel de la production sidérurgique ukrainienne est en effet situé dans les régions de Donetsk et de Louhansk, dans l’est du pays, où la guerre fait rage depuis 2014, et où se concentre l’essentiel des combats et des destructions.

Les usines Azovstal et Ilyich de Marioupol qui, en 2021, produisaient à elles seules 40 % de l’acier ukrainien, ont été largement détruites lors du siège de la ville portuaire, puis capturées par l’armée russe.

Non délocalisable

Selon les estimations du syndicat dirigé par Oleksandr Riabko, 40 % des emplois du secteur auraient disparu depuis le début de l’invasion, en février 2022. « Traditionnellement et géographiquement, nos entreprises sont concentrées dans les régions de l’est de l’Ukraine, confirme Riabko. Or une installation minière ou une usine métallurgique ne peuvent pas être délocalisées. »

Un avis partagé par Viktoriia Ahapova, qui estime que le gouvernement ukrainien n’est pas encore parvenu à mettre en place un programme de soutien « direct et ciblé » pour l’industrie sidérurgique. « Il existe bien des programmes de délocalisation mais ils ne fonctionnent que pour les petites entreprises, explique-t-elle. On ne peut pas déplacer un haut-fourneau ou un convertisseur. »

Destruction systématique

Il existe cependant des exemples de délocalisations réussies, à l’image de celle réalisée par Centravis, une entreprise ukrainienne figurant parmi les plus grands exportateurs mondiaux de tubes en acier inoxydable. Basée à Nikopol, ville régulièrement bombardée par l’armée russe, elle a inauguré en février dernier une succursale à Oujhorod, non loin de la frontière slovaque.

Mais de telles mesures, d’une ampleur limitée, peinent à compenser les pertes massives engendrées par la destruction systématique des infrastructures industrielles, énergétiques et de transports. « C’est une situation très compliquée, qui traîne en longueur, et qui fait qu’aujourd’hui, l’industrie fonctionne à environ 20-30 % de ses capacités », soupire Oleksandr Riabko.

Blocus de la mer Noire

Le volume des exportations a également été affecté par le blocus des voies maritimes par la Russie, ainsi que des voies terrestres par les manifestants aux frontières de la Pologne et de la Slovaquie. A la veille de l’invasion, 60 % du minerai de fer et 80 % de la fonte et des produits sidérurgiques ukrainiens étaient ainsi exportés via les ports de la mer Noire. « Les produits tubulaires sont expédiés par camion, ce qui signifie que le blocage des frontières par les transporteurs entraîne des pertes économiques et une suspension potentielle des activités », confirme Viktoriia Ahapova.

En novembre, le groupe Interpipe, producteur de tubes en acier et de roues ferroviaires, a ainsi déclaré avoir enregistré des pertes équivalentes à 1,2 million de dollars. Selon Viktoriia Ahapova, s’il est impératif de « débloquer les voies de transports » et d’assurer la sécurité des exportations, le gouvernement ukrainien doit également réformer le secteur en profondeur.

« Les augmentations soudaines et imprévisibles des tarifs des chemins de fer ou de l’électricité sont une mauvaise idée, estime-t-elle. Les poursuites judiciaires ou les perquisitions et saisies abusives ne sont pas non plus favorables à l’attractivité du pays pour les investisseurs. »

Guillaume Ptak (Correspondant à Kiev)

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