À Vesaignes-sur-Marne, entre Chaumont et Langres, la fonderie d’aluminium CERI a traversé des vents mauvais. Aujourd’hui dirigée par Mathieu Gueriel, l’entreprise voit son management modifié. Elle renoue avec l’avenir, investit, crée de l’emploi.

Bien des choses ont changé au sein de la discrète fonderie CERI de Vesaignes. À commencer par le nom, accompagné désormais du suffixe “SN” pour “Société nouvelle”. De fait, la nouveauté est bien réelle et touche bien des strates de l’entreprise, à part son fameux savoir-faire.

SN-CERI réalise, en fonderie gravité “coquille” selon des plans qui lui sont fournis par la clientèle – des fabrications du prototype à la petite ou grande série avec des alliages d’aluminium. L’entreprise avait été créée par Jean Le Cousse dans la région parisienne en 1985. Son extension l’a amenée à se délocaliser en Haute-Marne en 1993. Les choses se sont gâtées en 2022, jusqu’à la liquidation, en décembre de cette année-là. Et pourtant…

Pourtant, il y avait donc un fameux savoir-faire, il y avait des clients, un marché, des projets.

C’est là qu’interviennent Mathieu Gueriel et sa famille. Ils gèrent deux entreprises dans la Somme : une dans le décolletage, une dans la quincaillerie. Ils voulaient se diversifier. Mathieu Gueriel rencontre Sébastien et Estelle Lespagnol, qui travaillent chez Ceri. Le courant passe. Convaincus qu’il y a quelque chose à faire, les Gueriel créent alors la SN CERI et entrent en jouissance du site le 1er février 2023. L’aventure commence. Une aventure que Mathieu Gueriel qualifie d’abord « d’humaine ».

L’adjectif revient souvent dans son propos enthousiaste pour les forces vives de l’entreprise. Certes, lorsqu’il reprend, la trésorerie est anémique. Mais il est séduit par l’état d’esprit de la quinzaine de salariés : « Ils ont de l’expérience, un incroyable savoir-faire, l’amour du métier ». Mathieu Gueriel, que tout oppose à l’ancienne direction, décide d’investir dans des équipements qui vont améliorer au fil du temps les conditions de travail. Un premier four thermorégulé a déjà été mis en fonctionnement. D’autres investissements suivront.

L’entreprise recrute ; dans ce registre, la difficulté est réelle pour convaincre de nouveaux collaborateurs de rejoindre l’équipe de la petite usine perdue dans la campagne haut-marnaise. Perdue ? Pas tant que cela : Mathieu Gueriel, amoureux de la nature, rappelle que l’accès à l’autoroute n’est qu’à quelques minutes. Pour lui, un des premiers défis va surtout consister à ce que les nouveaux salariés se sentent bien, pour qu’ils restent. Il le répète à l’envi : « il faut ici des valeurs humaines ». Il s’y emploie. Ce côté humain, cette importance du relationnel, Mathieu Gueriel les applique aussi avec les clients, plutôt considérés comme des partenaires.

Après tout, des fonderies d’aluminium, il n’en reste pas tant que cela en France. SN-CERI travaille déjà pour une quarantaine de types différents de clients, dans l’agriculture, la mécanique, etc. Ils ont constaté que SN-CERI avait conservé son nom, son identité, ses compétences, mais que le management avait évolué.

Mathieu Gueriel, lui, est tombé sous le charme « des métiers du feu, des métiers qui ont une âme. Alors maintenant, il nous faut investir pour permettre aux salariés de bien travailler, dans de meilleures conditions ».

Mathieu Gueriel gère maintenant trois entreprises. Le jeune homme a de l’énergie et sait la faire passer. Il s’appuie localement sur Estelle et Sébastien Lespagnol. La vieille fonderie dissimulée entre les arbres sur les hauteurs de Vesaignes est vraiment devenue une “société nouvelle”. Le territoire doit s’en convaincre. C’est une chance.