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Depuis plusieurs semaines, sur une grande partie de la planète, les usines sont
restées portes closes, les voitures n’ont pas quitté les garages, le ciel s’est
quasiment vidé de ses avions et la pollution de l’air a chuté, tout comme le bruit
des villes. Des canards ont réinvesti des rues de Paris, quand celles de San
Francisco voyaient réapparaître quelques coyotes.
Qui n’a pas entendu un proche se réjouir de cette « pause » ? D’un retour à la
nature qui serait, somme toute, une contrepartie bienvenue à la crise générée par
la pandémie de coronavirus. « La pause actuelle donne l’impression d’une rupture
dans un cycle et l’occasion de mettre à plat ce qui est utile dans la société et ce qui
ne l’est pas », confirme Vincent Bontems, philosophe et chercheur au
Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).
Pour lechercheur, ces questionnements sont les « symptômes d’une crise culturelle »,
notamment autour d’une notion qu’il a beaucoup étudiée : le progrès.
Le progrès nous a-t-il menés trop loin ? Qu’attend-on encore de lui ? Le Larousse
le définit comme l’« évolution régulière de l’humanité, de la civilisation vers un but
idéal ». Avant le XVIe siècle, le progrès désignait une simple avancée, mais Francis
Bacon lui a ajouté une dimension qui ne l’a jamais quitté : l’accumulation de
connaissances pour aller vers le meilleur.
Qu’il s’agisse du confort, de la santé, la paix, la liberté, la sécurité ou encore la morale.
Le progrès fait place à l’innovation
L’idée a de quoi faire rêver. Pourtant ce n’est plus le cas aujourd’hui. Les
chercheurs Etienne Klein et Gérald Bronner ont étudié ses occurrences dans les
discours publics français : à partir des années 1980, le terme se fait plus rare pour
céder la place à un autre, plus ancien : « l’innovation ». D’après leurs travaux, en
2007, tous les candidats à la présidentielle évoquaient encore la notion de
« progrès ». Ce n’est plus le cas en 2012.
« L’innovation est pourtant une conception très dégradée de l’idée de progrès »,
explique Etienne Klein, philosophe des sciences et également chercheur au CEA.
« Le progrès, c’est accepter de sacrifier son présent personnel au nom des
générations futures. Il s’appuie sur l’idée que le temps est notre allié », poursuit-il. A
l’inverse, l’innovation est perçue comme une « condition de survie » pour
répondre aux défis de l’avenir.
« On ne parle plus de 2050 »
C’est le pessimisme grandissant sur l’avenir de l’humanité qui a détrôné l’idée de
progrès. Interrogé sur le bilan de la décennie 2010-2020 qui vient de s’achever,
Pierre Dockès, spécialiste de l’histoire de la pensée économique, évoque une
« rupture eschatologique » : « Jusqu’à la fin du XXe siècle, malgré des périodes de
doutes, on avait tendance à croire que l’âge d’or était devant nous, expliquait-il.
Aujourd’hui, on pense que demain sera moins bien et que nos enfants auront moins
que nous. »
Le progrès n’a pas fait disparaître les inégalités. Il n’a pas non plus mis à terre les
régimes autoritaires. Surtout, il est désormais posé comme « contre la nature »,
en puisant et épuisant les ressources de la planète dans une fuite en avant sans
issue. L’avenir inquiète, au point qu’on ne l’évoque même plus. « L’horizon
temporel s’est rétréci, on ne parle plus de 2050 ni de 2100 », note Etienne Klein. Si
ce n’est sur d’effrayants graphiques montrant les catastrophes écologiques à
venir.
Le progrès confondu avec la croissance
Pour croire de nouveau en notre avenir, il faut revoir notre définition du progrès
qui a dérivé au cours de l’histoire, argumente Vincent Bontems : les machines, qui
étaient censées nous faire effectuer autant de tâches avec moins d’énergie et en
moins de temps, nous servent en fait à en faire toujours plus, explique-t-il. Le
progrès technique doit nous permettre de « décélérer », et non l’inverse, résume
le chercheur, s’appuyant sur les travaux du philosophe Gilbert Simondon.
Mais d’autres logiques sont entrées en jeu : la compétition, la recherche de puissance
et de profit… et le progrès a fini par se confondre avec la croissance
économique.
Doit-on alors se réjouir de la décélération brutale imposée par le confinement, et
prôner la décroissance ? Pour Vincent Bontems, cette opposition entre croissance
et décroissance est « simpliste ». Le progrès n’est en effet ni le retour au silence et
à l’air pur que nous connaissons actuellement, ni l’accumulation continuelle à
l’oeuvre depuis des décennies. Le « monde d’après » la crise du coronavirus, s’il
en émerge un, doit en forger sa propre définition.
Plus ou mieux ?
« Nous savons ce que nous voulons éviter – les épidémies, le changement
climatique… -, mais nous ne savons pas ce que nous voulons », résume François
Gemenne, chercheur en sciences politiques à l’université de Liège et membre du
GIEC, le groupement international d’experts sur le climat. « On a associé le progrès
à l’idée de plus, alors que le grand défi est de l’associer à celle de mieux », poursuit il.
La crise actuelle pourrait nous y aider. « En quelques semaines, elle a modifié notre
rapport au futur », salue Etienne Klein, qui note qu’« on n’entend plus les
climatosceptiques et collapsologues, car on pense à l’après-crise et non plus à la fin
du monde ». Un premier pas vers une vision plus optimiste d’un destin commun
qui pourrait profiter à tous.