La fonderie et Piwi

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Par : piwi
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lundi 21 Oct, 2024
Catégorie : Automobile

L’Union Européenne a-t-elle décidé de tuer l’industrie automobile ?

L’Automobile Magazine.

L’Union Européenne a-t-elle décidé de tuer l’industrie automobile et ses 14 millions d’emplois ?

Entre des objectifs difficiles à tenir, des milliards d’euros d’amende et des ventes d’électriques qui faiblissent, l’automobile européenne va mal. Mais elle est surtout victime de bureaucrates déconnectés.

La politique ne consiste pas toujours à faire plaisir aux citoyens, mais il est quand même un prérequis à toute gouvernance démocratique stable : la concertation. Ce que semblent oublier les bureaucrates de l’Union européenne, entre autres sur le cap que doit suivre l’industrie automobile. Si cette dernière doit absolument participer à l’effort de réduction des émissions de gaz à effet de serre, à court comme à moyen et long termes, les objectifs de réduction de CO2 sonnent comme autant d’intenables couperets.

Ils seraient presque acceptables s’ils avaient été discutés en amont avec les acteurs de cette industrie, qui emploie 14 millions de personnes en Europe, et s’ils n’étaient pas doublés d’amendes massives en cas de non-respect.

D’un côté, l’UE espère toujours interdire la vente de voitures à moteurs thermiques neuves à partir de 2035, malgré les alertes répétées des constructeurs. La décision a beau sembler irréversible, elle reste conditionnée à plusieurs clauses de revoyure en cours de route, comme s’il fallait discrètement préserver une porte de sortie et décaler cette échéance. Mais, dès 2025, la moyenne annuelle de CO2 par voiture vendue doit drastiquement baisser (à 95 g/km) pour l’ensemble des constructeurs, sous peine de devoir payer, chacun, de lourdes amendes.

Il s’agit de la nouvelle norme CAFE. De 2025 à 2035, voilà placées les deux bornes d’un étau au milieu duquel l’industrie se retrouve prise et qui risque de produire tout l’effet inverse de celui espéré. Sans parler, tous les ans, du durcissement du malus prétendument écologique, avec un seuil de déclenchement encore abaissé, à 113 g/km en 2025 et potentiellement 99 g en 2027.

15 milliards d’euros d’amende

La Renault Clio est l'une des voitures les plus vendues en France.
La Renault Clio est l’une des voitures les plus vendues en France.© A.Krassovsky

Les objectifs sont toujours faits pour être durs à atteindre, mais les sanctions économiques, qui pourraient s’élever à 15 milliards d’euros pour les constructeurs sur la simple année 2025, sont un handicap pour le développement de la voiture électrique à long terme : ils s’additionnent à des chiffres de ventes préoccupants pour le “zéro émission”. Certes, la responsabilité doit être partagée avec les constructeurs. La marge affichée par certains groupes lors de la reprise post-pandémie suggère qu’il y avait moyen de baisser les prix de vente des voitures, qui ont explosé depuis dix ans.

Et l’on se serait sans doute bien passé des mensonges et scandales comme ceux du Dieselgate où, pour avoir truqué ses voitures pour qu’elles émettent moins de CO2 pendant les tests d’homologation, Volkswagen a écopé de milliards d’euros d’amende, discréditant au passage l’ensemble de la filière automobileIl n’empêche, à fixer des objectifs inatteignables tout en actant d’énormes sanctions économiques, l’UE place toute la filière automobile dans un cul-de-sac…

Deux salles, une même ambiance

Les choses n’en sont que plus complexes qu’au sein de cette même industrie, les voix diffèrent. D’un côté, Luca De Meo, patron du groupe Renault et de l’ACEA (pour faire valoir les intérêts de tous les constructeurs européens), ne cesse de mettre en garde sur ces sanctions et la casse sociale qui en découlerait. Il plaide logiquement pour un adoucissement des objectifs, sans s’exonérer de l’effort général que la filière automobile doit faire pour lutter contre le réchauffement climatique.

De l’autre, Carlos Tavares, patron du géant Stellantis, entièrement libre depuis qu’il a lui-même quitté l’ACEA, place l’UE face à ses responsabilités, arguant que la trajectoire est connue, annoncée depuis longtemps et qu’il fallait réfléchir plus tôt, avant de lancer ce grand tournant. Selon lui, il est trop tard pour tout chambouler alors que les constructeurs se sont mis en ordre de marche pour tenir la trajectoire. Deux postures pour une même critique : des décisions prises trop à la légère pour un secteur si lourd.

Du choix, mais moins d’acheteurs

La Dacia Spring est la citadine électrique la moins chère du marché.
La Dacia Spring est la citadine électrique la moins chère du marché.© Etienne Rovillé

À regarder le portefeuille des voitures électriques aujourd’hui disponibles, il est vrai que les constructeurs ont fait l’effort d’étoffer l’offre. Sans parler des prestations de chaque modèle, toutes les tailles et tous les segments sont couverts, de la citadine Dacia Spring à moins de 20 000 € à la Porsche Taycan en passant par pléthore de compactes (Mégane, ID.3, etc.) et de SUV familiaux (3008, Scenic, etc.). Et l’on ne discute plus les réels avantages offerts par cette énergie à l’usage : silence, douceur de fonctionnement, vivacité… 

Or, en face, après avoir beaucoup augmenté depuis trois ans, les acheteurs se raréfient. L’UE a beau vouloir forcer le destin, la réalité du marché de l’électrique demeure implacable. Les voitures à “piles” stagnent autour de 15% des ventes neuves, voire s’effondrent lorsque les États stoppent les aides à l’achat. Chères, offrant trop peu d’autonomie et ne concernant que les automobilistes ayant accès à un point de recharge – c’est-à-dire ceux qui habitent surtout en maison –, les voitures électriques ne s’adressent qu’à peu de gens. L’idée commence à faire son chemin. Reste, pour les décideurs de l’UE, à vite dépasser la démagogie et l’idéalisme, sous peine de fragiliser un des pans les plus importants de l’industrie européenne.

Car les premiers licenciements et dépôts de bilan chez les fournisseurs sont déjà actés. Il n’est plus temps de dire que la menace pour l’automobile européenne vient de Chine, elle vient de Bruxelles.

Journaliste automobile passionné depuis près de 10 ans, je prends un immense plaisir à décrypter l’actualité de ce fantastique objet de mobilité et de liberté. Sans oublier de parler moto, une autre déviance…

Zone de commentaire !

2 commentaires pour : "L’Union Européenne a-t-elle décidé de tuer l’industrie automobile ?"

  1. La messe est déjà dite. Le tissu industriel des sous-traitants européens de l’automobile est déjà entré dans une spirale infernale de dépôts de bilan et de faillites en cascade.

    L’industrie automobile européenne va subir dans les 10-12 ans à venir le même sort qu’ont subi les industries européennes du textile et la sidérurgie dans les années 1960-1980. Cet immense gâchis va se dérouler en 2 temps. Tout d’abord, tous les constructeurs européens (et occidentaux) vont se voir évincer du plus grand marché automobile mondial : la Chine. C’est déjà le cas pour Stellantis et Renault, tout comme pour General Motors et Ford. Je rappelle qu’il y a 9 ans de cela, la Chine était le premier marché de GM, devant les USA ! Le groupe Volkswagen et Mercedes vont suivre, car non seulement leur part de marché en Chine diminue inexorablement depuis plusieurs années, mais à présent ce sont les volumes de vente qui diminuent.
    Même BMW, qui progressait encore l’an dernier en Chine et dont c’est également (et de loin) son plus gros marché, voit ses ventes reculer là-bas cette année.

    Une fois les concurrents occidentaux évincés (ou quasiment) de leur marché local, ce sera au tour des constructeurs chinois d’investir en Europe afin de contourner les droits de douane imposés par l’Union Européenne. Ces nouvelles implantations à la pointe de la technologie feront le bonheur des collectivités locales, des régions et des états, qui subventionneront massivement ces installations, créant de fait une distorsion de concurrence avec les constructeurs européens embourbés dans leurs restructurations et autre plans sociaux en cours à ce moment-là.

    D’aucun pourrait se dire: « Les constructeurs chinois seront une chance pour la sous-traitance européenne. » C’est bien mal connaître l’industrie automobile chinoise, sa culture et ses dirigeants. Pour les pratiquer depuis 20 ans, et maintenant de manière intensive, je peux certifier qu’ils préfèreront toujours embarquer leurs sous-traitants chinois avec eux (en les forçant à investir en Europe) plutôt qu’en utilisant le tissu industriel existant. Ne serait-ce que pour avoir un levier sur les prix pratiqués par leurs fournisseurs. Sachez par exemple qu’en fonderie en général, les constructeurs automobiles chinois ne payent pas la première dotation en outillage. Tout est amorti dans le prix pièce, et il n’y a pas de garantie sur les quantités. Le risque repose donc entièrement sur le fondeur. De plus, le mono-sourcing n’existe pas. Il y a quasiment toujours un minimum de 2 fournisseurs par pièce. Le moins cher livrera 70% à 80% des volumes. Cette part évoluant en fonction de la compétition entre les fournisseurs.

    En résumé, si un fournisseur ne possède pas une technologie, un procédé ou une pièce qui présente au moins une caractéristique unique sur le marché, c’est juste une guerre des prix. Et à ce jeu, les entreprises européennes perdent le plus souvent.
    .

  2. En France et notement chez le Losange, pendant longtemps on payait chaque dotation d’outillages, première en trois ou quatre fois et renouvellement à la différence de la forge où l’on considérait l’outillage comme un consommable.
    Cela à pu changer, besoin en trésorerie oblige.
    Quand aux deux rarement trois fournisseurs tout dépend du volume: l’usineur ne veut pas de diversité donc un seul fournisseur lui suffit sauf que par simple précaution on en mettait deux, se souvenir de l’incendie des fonderies du Poitou.
    Chez Stellantis mais surtout ex PSA la fonderie est interne, ils achètent beaucoup plus pour amortir les écarts de volumes.

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