Le spectaculaire site industriel, plus gros consommateur électrique français, accélère sa transition énergétique. Avec, à court terme, un nouveau four et le recours au recyclage.
Face à la crise énergétique, Aluminium Dunkerque avait dû réduire sa production d’un quart dans l’urgence du très court terme. Revenue à pleine capacité depuis quelques semaines, le plus grand producteur d’aluminium primaire d’Europe concentre ses efforts sur sa décarbonation avec un plan très ambitieux (Low Carbon Aluminium), en trois phases, jusqu’en 2050. Car si l’aluminium, très léger, est plébiscité pour la transition bas carbone, notamment dans l’automobile, sa production, spectaculaire, requiert des quantités astronomiques d’énergie.
L’usine, parmi les plus émettrices de France, consomme l’équivalent d’une demi-tranche de la centrale nucléaire voisine de Gravelines. « Nous avons déjà baissé de 17 % nos émissions en dix ans et nous visons 5 % de moins dans les trois ans en émissions directes ».
Le recyclage arrive
La première phase de la feuille de route passe par le lancement, en 2025, d’un huitième four de fusion, pour 12 millions d’euros. Le dernier four avait été mis en service en 2004. Cet équipement accueillera pour la première fois une activité de recyclage qui permettra de produire 20.000 tonnes de lingots en intégrant 7.000 tonnes d’aluminium recyclé. Il portera la production du site à plus de 300.000 tonnes par an.
D’autres mesures plus modestes, comme les reports modaux vers le train ou le fluvial ou l’implantation d’une centrale solaire, doivent améliorer aussi la performance énergétique. Mais il faudra attendre la phase suivante pour abattre très fortement les émissions, soit 30 % d’ici à 2030, à travers la capture et le stockage du carbone.
La technologie est mature dans d’autres industries, mais pas encore dans l’industrie de l’aluminium. Un consortium est en cours de constitution avec plusieurs partenaires parmi lesquels le groupe Fives (équipementier), Trimet, l’autre aluminerie française, ou encore Rio Tinto.
La part du recyclage sera également accrue de 30.000 tonnes dans cette phase. Aluminium Dunkerque chiffre entre 200 et 250 millions d’euros les investissements pour cette étape.
Contrat électrique long terme
L’avènement des réacteurs EPR à Gravelines revêt une importance capitale, d’autant que la production d’Aluminium Dunkerque doit doubler à terme et sa consommation va fortement monter.
L’industriel vise pourtant une réduction d’émissions complémentaire de 70 % à l’horizon 2050 : il table pour ce faire sur la technologie de l’anode inerte. Il s’agit de substituer au carbone des anodes de nouveaux matériaux conducteurs, mais qui ne se combinent pas à l’oxygène lors de l’électrolyse.
L’enjeu est énorme et suppose un investissement de 2 à 2,5 milliards d’euros. Aluminium Dunkerque compte bien émarger au grand plan national annoncé par l’Etat pour décarboner ses 50 industriels les plus émetteurs . Guillaume de Goÿs vise notamment les dispositifs France Relance et France 2030, mais aussi les fonds d’innovation européens.