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Par : piwi
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lundi 13 Mai, 2024
Catégorie : AAESFF

Le monde a faim de cuivre

LES ECHOS

Le monde a faim de cuivre

Sur les marchés des matières premières, explique Philippe Chalmin, le vent souffle en faveur du cuivre et de la croissance externe, comme l’a montrée l’offre de BHP sur Anglo American.

Déjà à plus de 10.000 dollars la tonne, le cuivre dépassera probablement les 15.000 dollars d'ici à la fin de la décennie.
Déjà à plus de 10.000 dollars la tonne, le cuivre dépassera probablement les 15.000 dollars d’ici à la fin de la décennie. (MUJAHID SAFODIEN/AFP)

Par Philippe Chalmin (professeur d’histoire économique à l’université Paris Dauphine et président fondateur de Cyclope)

le monde de la mine et des métaux : des histoires aussi qui se terminent mal. Qui se souvient ainsi de Pechiney racheté par Alcan, lui-même avalé par Rio Tinto ?

Longtemps, la géographie des compagnies minières mondiales fut celle des empires coloniaux britannique, belge, hollandais et américain, si l’on songe à l’Amérique du Sud. La grande vague des nationalisations des années soixante-dix du siècle dernier balaya l’essentiel de cette première génération des « multinationales » de la mine.

On assista alors à un repli vers des pays plus sûrs : outre le Canada, dont la tradition minière est fort ancienne, ce furent notamment l’Australie et le Brésil. De nouveaux géants de la mine apparurent, présents sur la plupart des métaux non ferreux, mais aussi dans le charbon et le minerai de fer : ce furent deux australiens (BHP et Rio Tinto), un brésilien (Vale), un sud-africain (Anglo American) et un « suisse » (Glencore, à l’origine un négociant).

Toutes choses égales par ailleurs, ils sont l’équivalent des cinq « majors » de l’énergie, mais ni leur taille ni leur puissance financière ne sont comparables. Il y a une bonne dizaine d’années, des rumeurs de fusion entre l’un et l’autre avaient circulé, mais sans se concrétiser. On parlait aussi de l’intérêt que pouvaient leur porter des acteurs chinois.

Croissance externe privilégiée

Sur les marchés des matières premières, le vent a soufflé en faveur des producteurs de fer et de charbon. L’augmentation de la demande chinoise a fait le bonheur des australiens BHP et Rio Tinto, mais aussi du brésilien Vale et de Glencore pour le charbon. Les producteurs de métaux non ferreux ont par contre traversé – et traversent encore pour le nickel – des périodes difficiles.

Tout ceci a redonné quelque appétit aux grands mineurs confrontés au dilemme classique : croissance interne ou externe ? Plus que jamais, le lancement de nouveaux projets miniers apparaît aléatoire, même pour le cuivre, porté par la quasi-certitude d’une demande en forte croissance dans les années à venir. Mais il faut au bas mot compter 10 milliards de dollars, au moins dix ans pour la mise en oeuvre de la mine sans oublier tous les problèmes et contestations provenant tant des relations avec les autorités locales que des mouvements environnementaux.

Ainsi, fin 2023, les autorités du Panama ont décidé de la fermeture de Cobre Panama, l’une des plus importantes mines de cuivre à ciel ouvert au monde, qui appartient au canadien First Quantum, qui avait encore une bonne vingtaine d’années d’exploitation devant elle. Ceci explique bien le manque d’appétence actuel pour l’investissement minier.

Avec des poches pleines, c’est donc la croissance externe qui est privilégiée et parmi les « cinq grands », Anglo American est incontestablement le maillon faible. Anglo, c’est en effet, pour 40 % de son activité, l’Afrique du Sud et tous ses problèmes au quotidien, comme l’insuffisance de son réseau électrique qui pèse sur l’activité minière.

En Afrique du Sud, Anglo produit platine et diamants notamment, dont la conjoncture est pour le moins déprimée. La pépite, par contre, ce sont les 850.000 tonnes de cuivre produites au Chili et au Pérou. BHP, lui-même gros producteur de cuivre, ne s’y est pas trompé en faisant une offre sur Anglo et en proposant explicitement de se débarrasser des actifs sud-africains. Anglo l’a repoussée, mais l’histoire ne fait que commencer avec quelques autres prédateurs (Glencore ?) affûtant leurs couteaux.

Mais ce qu’il faut retenir, c’est la place donnée ici au cuivre . Déjà à plus de 10.000 dollars la tonne, celui-ci dépassera probablement les 15.000 dollars d’ici à la fin de la décennie, tant le fossé va se creuser entre une offre stagnante dans le meilleur des cas et une demande qui ne va cesser d’augmenter.

BHP et Anglo pèseraient 10 % du marché mondial et seraient ainsi aux premières loges de la transition énergétique. Et c’est moins cher payé qu’un investissement minier plus aléatoire que jamais.

Ainsi va le monde de la mine et des métaux : des histoires aussi qui se terminent mal. Qui se souvient ainsi de Pechiney racheté par Alcan, lui-même avalé par Rio Tinto ?

Philippe Chalmin est professeur d’histoire économique à l’université Paris-Dauphine et président-fondateur de Cyclope.

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