Les Echos –
SPECIAL MADE IN FRANCE Le virage serré de l’industrie automobile vers la voiture électrique va détruire les emplois liés au moteur thermique en France, mais il peut aussi permettre de relancer la production locale. A condition que le territoire soit assez attractif pour attirer non seulement les usines d’assemblage, mais aussi celles des sous-traitants de la filière.
La production automobile dans l’Hexagone est tombée de 3,7 millions en 2004 à 1,3 million en 2020, année noire de crise sanitaire.
Les hommes politiques de tous bords en rêvent : le virage vers la voiture électrique doit favoriser le retour de la production automobile en France. Beaucoup veulent en effet voir dans les nouvelles technologies qui s’imposeront de fait au cours des dix ou quinze prochaines années l’occasion d’inverser la tendance qui plombe les usines tricolores du secteur depuis le début des années 2000.
Le constat est pour l’heure très cruel. De 3,7 millions en 2004, le nombre de véhicules made in France est tombé à 1,3 million en 2020, année noire de crise sanitaire. Même si le niveau remonte à 1,8 ou 1,9 million comme prévu avant le Covid-19, ce sera encore près de deux fois moins qu’il y a quinze ans ! « Les petites voitures de segment B (Clio, 208) sont de plus en plus complexes, et leur assemblage nécessite des effectifs importants », rappelle l’économiste Bernard Jullien, maître de conférences à l’université de Bordeaux.
50.000 emplois en danger
D’où les décisions des constructeurs de les produire dans des pays à bas coûts : Espagne d’abord, puis Turquie, Maroc, Slovaquie… « En outre, comme certaines pièces voyagent mal, ces délocalisations ont entraîné avec elles celles de sous-traitants, provoquant un double effet sur l’emploi », poursuit l’expert. Selon une étude récente de l’Observatoire de la métallurgie, le secteur a perdu près de 76.000 emplois (sur 270.000), soit 28 % de ses effectifs, entre 2008 et 2019. Une véritable hémorragie.
Remonter la pente grâce à la voiture électrique est loin d’être un pari gagné d’avance. La fabrication des moteurs thermiques mobilise actuellement encore environ 50.000 emplois dans l’Hexagone, qui sont donc clairement en danger. En outre les voitures électriques sont moins gourmandes en main-d’oeuvre que les véhicules thermiques : leur temps d’assemblage est inférieur de 30 à 35 %, selon le cLa voiture électrique, une aubaine à saisir pour l’industrie française
Automobile : les constructeurs français anticipent une hémorragie d’emplois
Mais cet écart est paradoxalement aussi une chance, puisque la masse salariale pèse finalement moins dans le coût total des voitures électriques. C’est le pari que fait Renault avec son grand pôle dans le nord de la France , Renault ElectriCity, dédié aux voitures électriques : il espère y produire 500.000 véhicules par an à compter de 2025, dont la familiale Megane-e mais aussi la future petite R5 électrique.