Fonderies du Poitou à Ingrandes (Vienne) : « On a tout démonté, je pars un jour avant l’ultimatum d’expulsion de la justice ! »
Les forces de l’ordre n’auront pas besoin d’intervenir. Le dépeceur belge des Fonderies du Poitou a vidé les bâtiments à Ingrandes. Un jour avant la date fatidique de la justice.
La gendarmerie n’aura pas à intervenir pour expulser Helmut Ulin et ses ouvriers des Fonderies du Poitou, fermées depuis leur placement en liquidation judiciaire.
Le patron de Chabimmo et son fiston, chargés de démanteler les usines du site d’Ingrandes (près de Châtellerault) après avoir remporté le marché en novembre 2022 (vente aux enchères) moyennant le paiement de 5 millions d’euros (frais et moules de chez Renault compris), estime avoir rempli son contrat, malgré la menace judiciaire d’expulsion (1). « Je pars une journée avant le délai, », indiquait ce lundi 19 août le savoureux et truculent personnage, Helmut Ulin, 65 ans, rencontré sur place.
« Les usines sont vides, on a tout démantelé »
Il dit avoir démonté toutes les machines et le matériel qu’abritaient les deux usines (fonte et alu) appelées à être rasées. Soit 70.000 m2 de bâtiments sur 40 ha de terrain. Tout a été viré, de fond en comble. Enfin presque.
« Les locaux sont vides. On a tout désossé, tout enlevé à l’intérieur des bâtiments : machinerie, installations… Tout est vide mais il reste encore quelques tas de déchets, de l’huile mélangée dans les caves, du matériel à certains endroits mais ces derniers n’ont pas été dépollués et on ne peut pas intervenir, comme les installations de rétention en sous-sol au centre d’usinage de la fonderie alu. C’est trop dangereux. Les condensats doivent être enlevés par une société spécialisée. »
5 M€ investis, 10 M€ à la clef
Au total, l’homme aux 50 années d’expérience dans le démantèlement estime avoir démonté plus de 30.000 tonnes de matériel dans les entrailles des fonderies qu’il a revendues à des sociétés de récupération de métaux (Lostis, Derichebourg, Pascault…). « Je dois encore affiner mes calculs mais on a dû écouler pour 10 millions d’euros. »
Le bougre, avec 5 millions investis, il en a eu pour son argent, pourrait-on croire. Pas forcément, riposte-t-il. « 10 millions, c’est loin d’être le bénéfice car il y a des coûts : main-d’œuvre, déplacement, énergie, carburant… Pour s’en sortir, il faut au moins doubler la vente du prix d’achat. Ce que j’ai fait. »
80 tonnes de lingots partis en Thaïlande
Parmi les bonnes affaires que le sexagénaire belge a réalisées sur le site, il cite la vente de lingots d’aluminium à un acheteur thaïlandais. « Tout le stock, 80 tonnes environ, est parti par bateau en Thaïlande ! »
Dans ce fatras de suie et poussière métallique, Helmut Ulin dirait presque avoir réalisé un tour de force. « On l’a fait en un an et demi. En huit mois, c’était impossible. Ça fait un an qu’ils disent qu’on est illégal sur le site. On y était tout le temps. Chaque jour, après dix minutes de travail, on ne voyait plus la couleur de notre peau. »
« Cette nuit, je repars en Belgique »
Ces « gueules noires » étaient une dizaine. Des machinistes, des chalumistes, des manœuvres. Avec des engins de chantier, des pelleteuses, des élévateurs… « On vivait sur place. On avait installé un bassin de vie dans les bureaux avec lits, douches, frigos… »
Helmut Ulin lève donc le camp ce lundi soir. J-1 avant l’ultimatum fixé par la justice. « Cette nuit, je pars en Belgique, avec le sentiment du devoir accompli. Tchao, Châtellerault ! »
Et maintenant les bâtiments
Maintenant que les installations ont été démantelées, place à la démolition des bâtiments (vides ou presque vides) à proprement parler. Deux permis de démolir sont affichés à l’entrée du site des Fonderies. Tout sera rasé. Ces permis ont été déposés par le mandataire liquidateur de l’ancien site industriel et délivrés par la mairie d’Ingrandes.
Le plan de démolition a été déterminé par les sociétés Lhyfe (production d’hydrogène) et TSE Foncière (production d’énergie solaire), réunies en consortium dans le rachat du foncier des Fonderies validé en 2023. Les activités de ces dernières ne débuteront pas avant 2028.
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On ne va certainement pas s’en réjouir !
Devant un problème il y a plusieurs solutions : la bonne, la mauvaise et … la Française !!
Merci RENAULT pour ce lamentable exemple de gestion (sic) industrielle, que l’on connait trop souvent dans notre pays!