FRANCE 3
L’usine Alvance Wheels, sur la ZI de la Martinerie à Diors.
Le tribunal de commerce de Paris a validé ce 1er février la reprise du site Alvance Wheels de Diors par la société d’Emile Di Sario (EDS), président du groupe de fonderie français Saint-Jean Industries. En revanche, seule la moitié des salariés seront maintenus.
C’est la fin d’un très long suspense pour les salariés du site Alvance Aluminium Wheels de Diors, près de Châteauroux. Ce 1er février, le tribunal de commerce de Paris a validé la reprise de l’usine par la société d’Émile Di Sario, le président du groupe de fonderie français Saint-Jean Industries. La décision a été saluée par Bruno Le Maire et Agnès Pannier-Runancher, respectivement ministre de l’Économie et ministre déléguée chargée de l’Industrie.
Un plan de long terme à 60 millions d’euros
L’usine, qui sera rebaptisée Imperial Wheels, reprendra seulement 166 salariés sur les quelque 280 qui sont encore affectés à Alvance Wheels. Mais si elle se pérennise, cette implantation industrielle vise une cible de 400 emplois à l’horizon 2026.
Et cette fois, l’objectif affiché est bien celui d’une reprise durable et compétitive. En atteste l’engagement « ferme » des constructeurs Renault et Stellantis sur un important volume de commandes en 2023. En mal d’investissements depuis plus de vingt ans, l’usine recevra en outre 43 millions d’euros pour moderniser l’outil de travail, sur une opération globale de reprise d’environ 60 millions d’euros
Cette somme doit servir à faire d’Imperial Wheels une « usine moderne, automatisée, capable de s’adresser aux marchés de Renault et de Stellantis mais aussi aux autres clients, dont des constructeurs européens », précise le ministère de l’Industrie. « Pour que le projet réussisse au-delà de 2023, il faut que l’usine parvienne à se positionner sur de nouveaux modèles », notamment les roues de grande taille « grâce à une nouvelle technologie, Cobawheels, apportée par le repreneur ».
« C’est sûr que ça va faire vide »
Les salariés sur le départ devraient être licenciés dans les prochains jours, selon le ministère. Sur place, les représentants du personnel ont appris l’officialisation de la reprise… par les journalistes venus demander leurs réactions. « L’apprendre par voie de presse, alors que la direction devait avoir eu l’info bien en amont, je trouve ça assez pathétique » lâche Christophe Bouvet, délégué CFDT et secrétaire du CSE.
Quant au moral des salariés, il est partagé. Certes, c’est la fin de mois d’attente, à craindre la liquidation de l’entreprise, mais il y a néanmoins de « l’incompréhension, voire de la colère », chez certains, déjà avisés que leurs postes ne seraient pas reconduits. « C’est sûr que ça va faire vide. Ça fait bizarre de voir des gens qu’on côtoyait venir prendre leurs affaires. » En ce qui concerne le repreneur, une « nouvelle organisation » doit se mettre sur pied, et de nouvelles discussions prendre place entre employeur et employés. « On a beaucoup de choses à voir, mais il faut être optimistes ! »
Du côté de la CGT, le délégué Antony Barbaczi ne se dit « pas plus rassuré que ça ». « Je content qu’on soit encore vivants », reconnaît-il, mais « déçu des licenciements secs, surtout quand on voit ce qu’Alvance a touché comme subvention ». Certains salariés vivent déjà dans une situation de « détresse » psychologique, poursuit le syndicaliste. Il s’agit en particulier d’ouvrier « entre 57 et 60 ans », ceux « qui ne vont pas retrouver de travail et n’ont pas cotisé assez pour avoir une retraite décente ». « Moi je ne comprend pas cette stratégie qui consiste à licencier des gens en disant qu’on va réembaucher ensuite, surtout quand on voit la quantité d’argent public investie. »
Les employés licenciés pourront avoir accès au Fonds d’accompagnement et de reconversion des salariés licenciés dans la filière automobile, qui intègre des aides à la mobilité, à la création d’entreprise, et garantit une rémunération nette pendant un an.
Sur les 60 millions d’euros de l’opération, 41 millions proviennent directement de l’État, via 11 millions d’euros de subvention dans le cadre de France Relance et 30 millions d’euros de prêt. La région Centre-Val de Loire participe également à hauteur de 5 millions d’euros, divisés entre un apport et des prêts. 7 millions supplémentaires proviennent du Fonds avenir automobile, auquel participent Bpifrance, Renault, PSA et l’Etat. Enfin, le repreneur arrive avec un apport de 7 millions d’euros, dont 5 millions en nature (en particulier en propriété intellectuelle).
Depuis plus de vingt ans, le site de Diors souffre d’un « déficit d’investissement », observe le ministère, et s’est retrouvé « mal positionné pour gagner des marchés ».
Au fil des années, le site est en effet passé de mains en mains et a changé de nom plusieurs fois : Montupet, Liberty Wheels, F2R. Mais toujours avec un fort retard d’investissement, qui l’a empêché de rester compétitif et a vu la masse salariale fondre comme neige au soleil. Depuis le printemps 2021, les salariés vivaient sous l’épée de Damoclès d’un licenciement judiciaire. Désormais, une partie au moins d’entre eux pourra reprendre le travail.
Quant aux années à venir, la stratégie met désormais l’accent sur l’innovation et le développement afin de rattraper le retard accumulé. Et, à terme, faire revenir près de 300 emplois supplémentaires au sein de l’usine pour fabriquer ces nouveaux modèles.