Esquissé avant la liquidation de la fonderie d’aluminium de Saint-Claude, un projet de SCOP laisse toujours planer l’espoir d’un redémarrage de l’activité. Etat et région se disent prêts à le soutenir, mais l’engagement des constructeurs automobiles n’est pas acquis. Pendant ce temps, l’Etat déploie ses dispositifs pour limiter la casse sociale.
Les employés de la fonderie se relaient toujours à l’usine pour veiller sur l’outil de production.
Près de cinq mois après la liquidation judiciaire prononcée le 22 juin par le tribunal de commerce de Dijon (Côte-d’Or), les 272 salariés de MBF Aluminium, à Saint-Claude (Jura), sont confrontés à un dilemme. Doivent-ils tourner la page et essayer de se reclasser comme les y incite l’Etat à travers les dispositifs mis en place pour les accompagner ? Ou y croire encore et tenter de relancer la fonderie d’aluminium sous forme d’une SCOP (société coopérative et participative) ? Le projet est certes plus modeste et incertain mais il aurait le mérite de faire perdurer le savoir-faire local et de conserver 50 à 100 emplois.
Ce projet avait été esquissé début juin, alors qu’aucun repreneur ne semblait répondre aux attentes, et dispose désormais de moins d’un mois pour être bouclé. Mi-octobre, la cour d’appel de Dijon a en effet reporté au 16 décembre sa décision concernant la procédure d’appel de la liquidation lancée le 1er juillet par le CSE. Quelle que soit l’issue, ce délai repousse la vente des actifs par le liquidateur et permet aux salariés d’y croire encore. Ils se relaient toujours à l’usine pour veiller sur l’outil de production.
Engagement sur les volumes
« Le projet est finalisé et a été présenté à Renault, Stellantis, la région Bourgogne-Franche-Comté et l’Etat », explique Nail Yalcin, délégué CGT du site et membre du CSE. « Après la liquidation, les deux constructeurs nous avaient donné un accord de principe pour accompagner un projet industriel viable, et, le 8 octobre, Stellantis nous proposait de s’engager pour un volume de 30 % de celui confié avant la liquidation », détaille-t-il.
« Nous suivons ce projet qui nécessite un plan d’investissement ambitieux », confirme un porte-parole du constructeur. « Mais dans le contexte actuel, ces 30 %, c’est une hypothèse de travail, pas un engagement. » Renault, de son côté, assure avoir entrepris une discussion avec ses fournisseurs de rang 1 pour leur proposer de travailler avec la future SCOP qui interviendrait alors en rang 2. « Nos relations sont cordiales mais on n’avance pas. Nous avons besoin d’engagement sur des volumes pour nous recalibrer », déplore le salarié élu, qui table plutôt maintenant, compte tenu de ces prévisions, sur un redémarrage avec 50 salariés.
Dans une première hypothèse d’une charge répartie à 70 % pour Stellantis, 20 % pour Renault et 10 % pour d’autres clients et secteurs, il était prévu que la SCOP puisse repartir avec 120 salariés, dans un objectif de chiffre d’affaires de 20 millions d’euros et une montée en puissance de la diversification d’ici à 2025.
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Etat et Région se disent néanmoins toujours prêts à suivre si les constructeurs s’engagent et si le projet est économiquement viable. La région pourrait prendre un tiers du capital et aider sur l’investissement, tandis que l’Etat pourrait apporter 3,8 millions d’euros en subventions et prêts, sur un plan initial de financement de 7 millions d’euros. « Nous serions très contents d’accompagner ce projet », indique le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher, la ministre déléguée chargée de l’Industrie. « Mais pour qu’il existe, il faut le soutien des constructeurs, comme souvent dans l’automobile, et il paraît compliqué de les remobiliser sur ce site », souligne son entourage.
30 projets industriels identifiés
En attendant, deux dispositifs de l’Etat ont été déployés à Saint-Claude pour limiter la casse sociale. Le « fonds fonderie » , doté de 50 millions d’euros (dont 10 millions de Renault et autant de Stellantis), doit permettre aux salariés de partir avec des compensations semblables à celles qu’offrirait un gros PSE s’ils s’engagent dans un contrat de sécurisation professionnelle. Selon Bercy, 214 salariés y auraient adhéré.
L’autre dispositif consiste en une « mission choc industriel », un outil lancé par la secrétaire d’Etat à l’Industrie pour définir une feuille de route avec les collectivités locales et faire émerger des projets. La mission se termine et, selon le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher, 30 projets industriels ont été identifiés – dont celui de SCOP – et parmi eux 7 qui pourraient bénéficier d’un soutien du plan de relance et permettre la création d’une cinquantaine d’emplois.