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Par : piwi
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jeudi 22 Août, 2013
Catégorie : Selon la presse

Redressement judiciaire : les cessions dangereuses (cas de Métaltemple)

En effet, celle-ci limite aux seuls tiers la cession des actifs et activités d’une entreprise défaillante et ne laisse donc au dirigeant de celle-ci que la possibilité de présenter un plan de continuation en l’obligeant logiquement, de ce fait, à assumer, certes dans la durée, le passif constitué, sous réserve des aménagements que pourront consentir les créanciers. Cette disposition d’ordre public de respect de la qualité de tiers des cessionnaires est généralement particulièrement surveillée par les tribunaux et constitue un des principes fondamentaux de cette législation.

Comment expliquer dès lors cette situation où l’on voit des dirigeants actionnaires autorisés à réexploiter des actifs libérés de tout passif et, après un détourage opportun, allégés de quelques emplois ? Ces deux décisions ont été prises dans un contexte d’impossibilité manifeste pour l’entreprise d’assumer le passif de la société, y compris celui né de la restructuration sociale nécessaire au maintien de l’activité.


Cette situation est évidemment fréquente et, en pareil cas, les tribunaux ont régulièrement la possibilité d’orienter leur choix sur des solutions externes émanant de tiers postulants. Ici, c’est l’absence de solution de reprise alternative et surtout le souci de préservation d’une partie des emplois qui a, sans conteste, amené les juridictions de premier degré à franchir la ligne rouge et à accepter l’idée de permettre une cession contre nature au dirigeant actionnaire. Théoriquement, cette situation aurait dû conduire à la liquidation de l’entreprise et à sa disparition. On savait la problématique sociale et des emplois omniprésente dans les décisions des tribunaux de commerce en la matière, on imaginait mal qu’elle puisse être à ce point fondamentale et justifier une telle décision.

D’autant que ces deux décisions ne feront vraisemblablement l’objet d’aucune contestation, notamment du fait de l’absence de repreneur évincé et de contestataire légitime. Elles ont de toute façon été prises sous l’oeil « bienveillant » du ministère public.

Ces deux décisions constituent cependant des précédents quelque peu dérangeants. D’une part parce que, loin de résoudre une problématique sociale, elles la complexifient en introduisant une brèche dans le dispositif de restructuration sociale français, en permettant aux dirigeants actionnaires de mettre en oeuvre une restructuration sociale sans en supporter le coût. Certains se réjouiront du sauvetage de quelques emplois tandis que d’autres verront immédiatement le risque d’une généralisation de ces pratiques.

D’autre part, ces décisions, en donnant l’opportunité au dirigeant actionnaire d’évacuer le passif constitué et de poursuivre l’exploitation de l’entreprise, créent une distorsion concurrentielle économiquement préjudiciable aux autres opérateurs, performants ou déjà un peu fragilisés, intervenant sur les secteurs d’activité concernés.

Ces deux décisions sont surtout révélatrices de la crise économique structurelle que nous subissons, de la frilosité des repreneurs potentiels et de la pauvreté des solutions de pérennisation des entreprises défaillantes ainsi que de la dérive progressive à laquelle nous assistons conduisant au sacrifice de quelques principes fondamentaux sur l’autel de la détresse économique et sociale. Un jeu dangereux.
Stéphan Béraud

Stéphan Béraud est associé fondateur d’Oxige

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