Le pont de Gènes s’écroule, des immeubles s’effondrent à Marseille, New York s’affaisse et l’A13 s’ouvre. Même le béton est fragile, constate Gaspard Koenig, qui nous invite à en tourner la page.
Par Gaspard Koenig (philosophe)
Ces derniers temps, les artefacts qui semblaient les plus indestructibles subissent des catastrophes auparavant inimaginables.
Le pont de Gênes s’écroule.
Des avions Boeing perdent une roue au décollage ou une porte en plein vol.
Des immeubles s’effondrent à Lille, Marseille ou Paris.
On découvre que New York, Jakarta ou Pékin s’affaissent de plusieurs millimètres par an sous le poids de leurs gratte-ciel.
La menace de sécheresses pluriannuelles nous force à ouvrir les yeux sur les fuites de nos réseaux d’eau.
Dernier épisode en date, une fissure apparue sur l’autoroute A13 a relancé le débat ouvert en 2022 par la Cour des comptes sur les investissements colossaux nécessaires à l’entretien des routes.
Toutes nos belles inventions sont-elles en train de tomber en ruine ?
Notre modernité est pourtant fondée sur une promesse de solidité. Le conte des « Trois Petits Cochons » date seulement de la fin du XIXe siècle. Les petits enfants de l’ère industrielle apprennent donc que la maison la plus désirable, la plus protectrice, la seule qui résiste au souffle des bêtes sauvages, est construite en brique et ciment. Dans ce cube dur et orthogonal, nous nous sentons en sécurité.
Comme si nous étions enfin à l’abri des forces physiques.