En circulant dans la rue de Gardès, impossible de manquer le calicot accroché au mur de la fonderie Gillet. Mais pourquoi donc afficher aussi ostensiblement les nuisances liées à l’activité de la fonderie, connues depuis plusieurs siècles ? Bien sûr, on constate également que juste à côté, les onze maisons de la résidence Saint-Rémy sont en cours de construction. Les fondeurs ont-ils voulu prévenir les futurs occupants? Confirmation le Pierre Lenne, PDG de la fonderie : «Quand on a vu les fondations des maisons, vers octobre 2012, on a alerté les autorités sur les conséquences que devraient subir les futurs occupants de ces maisons dont les fenêtres sont à sept, huit mètres de la fonderie. Comme nous n’avions pas de retour nous avons décidé d’accrocher le calicot. De 4 heures à 14 heures l’été, de 6 heures à 16 heures l’hiver, poursuit le PDG, le marteau-pilon tasse le sable chimique, ça produit des vibrations, du bruit et des odeurs. Ces maisons vont être inhabitables».
«On gêne la vente»
Toujours est-il qu’un bras de fer par tribunal interposé est d’ores et déjà engagé entre la fonderie et le promoteur Toulousaine d’habitations, puisque ce dernier a demandé via un référé à ce que le calicot soit enlevé. «On gêne la vente des maisons», estime Pierre Lenne, «on attend le jugement puis on aura sept jours pour retirer la banderole, mais le problème ne sera pas pour autant réglé». De son côté, Pascal Barbottin président de la Toulousaine d’habitation se montre peu bavard : «Nous avons des voisins conciliants, lâche-t-il ironiquement, pour ce qui nous concerne nous agissons dans le cadre de l’urbanisme normal. La fonderie a un problème de fonctionnement». Mais pourquoi demander l’enlèvement du calicot ? «Je ne souhaite pas n’exprimer sur ce point», conclut Pascal Barbottin.
A-t-on parié sur la disparition de Gillet?
Comment en toute connaissance de cause, peut-on autoriser la construction de logements à proximité immédiate d’une entreprise industrielle bruyante ? Deux hypothèses viennent immédiatement à l’esprit. D’un côté, le pari a été fait que la fonderie ne fonctionnerait pas longtemps et donc que les futurs occupants ne seraient quasiment pas gênés, d’un autre, les patrons de l’entreprise entendent «profiter» de ce contexte inconfortable pour justifier une cessation ou un transfert de l’activité. (Il en coûterait alors 2,5 M€ à la fonderie, somme qu’elle ne peut y consacrer). Dans les deux cas que deviendraient les 45 salariés? Et dans les deux cas les «parieurs» peuvent étayer leurs convictions au regard des années chaotiques que vient de vivre la fonderie.
La fonderie Gillet est présente sur Albi depuis 1687, d’abord en centre-ville puis à la rue de Gardès. Jusqu’en 2008, c’est la famille Gillet qui la gérait. En août 2008, la société Sofual métallurgie devenait propriétaire. C’est une filiale du groupe Sobral qui possède plusieurs fonderies dans l’Hexagone. L’activité était maintenue avec 33 salariés sur 40. En septembre 2009 Anne Gillet, l’ancienne directrice, conservée par les nouveaux propriétaires et sept salariés étaient à leur tour licenciés. La crise économique était évoquée. Le vol de cuivre en novembre 2010, le feu d’un four en janvier 2011, le gel en février 2012 n’épargneront pas la fonderie jusqu’au nouveau coup dur, l’incendie de Sofual vendredi dernier à Saint-Juéry. Sofual fabrique des lingots d’aluminium dont une partie est livrée à la fonderie. Mais depuis vendredi, Sofual ne produit plus et la fonderie doit s’approvisionner ailleurs. Des coûts supplémentaires à prévoir pour la fonderie qui n’a déjà «pas de capitalisation et qui ne redistribue rien à ses salariés en fin d’année» selon son PDG.
repères
Le chiffre : 1 687
Gillet>Albi. Cela fait plus de trois cents ans que la fonderie Gillet est installée à Albi.
«Tout le monde savait»
Une délibération du conseil municipal d’Albi a autorisé à l’unanimité, la vente du terrain de 3285 m2 à la société Patrimoine Toulousaine habitations le 27/6/2011. «Tout le monde connaissait alors le contexte de voisinage», précise-t-on à la mairie, laquelle «a manifesté publiquemeent le souhait de conserver la fonderie». Cette dernière doit se mettre en conformité avec l’arrêté préfectoral d’une mise aux normes pour le bruit. Le PDG de la fonderie convient que cette norme est «largement dépassée».
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