Les Echos –
Retours vers le futur : sous le coup de la crise du Covid-19 et des deux confinements successifs, de nombreux secteurs ont battu des records à l’envers en 2020. Des décennies de croissance ont été effacées en quelques mois.
Avec le Covid, la fréquentation des salles de cinéma est retombée au niveau de 1919, l’année où Charlie Chaplin entreprit la réalisation du « Kid ».
Le millésime 2020 restera dans les annales de l’économie, mais pour des raisons totalement inimaginables en début d’année. En termes de volumes vendus où de nombre de clients annuels, il faut remonter extrêmement loin dans le temps pour trouver des niveaux similaires dans de nombreux secteurs économiques.
Florilège des décroissances les plus spectaculaires.
Covid : une chute économique « sans précédent en temps de paix »
Les ventes de voitures à leur niveau de 1975
Dans l’automobile, le retour en arrière de l’activité est considérable . Il faut remonter de quarante-cinq ans (en 1975 !) pour trouver un marché automobile aussi bas dans l’Hexagone, avec 1,6 million de voitures neuves achetées. Une autre époque, même si c’est aussi la crise qui faisait alors l’actualité. Le premier choc pétrolier avait fait flamber les prix des carburants et venait de provoquer la dégringolade des immatriculations. Les ventes repartiront toutefois aussitôt à la hausse, pour franchir le cap des 2 millions dès 1978.
Renault contre Peugeot et Citroën, le match d’un siècle
Le cinéma retombe… aux débuts du muet
Cette année, sur les films qui surnagent en tête du Top 10, huit sont sortis avant le premier confinement, à la mi-mars. La chute catastrophique de fréquentation a dissuadé les majors hollywoodiennes de lancer leurs « blockbusters » selon le calendrier prévu, à l’image du nouveau James Bond qui bat un record retard de lancement. Les producteurs développent une stratégie de multidiffusion (streaming, VOD…), dans l’espoir de sauver les meubles sur une partie des longs-métrages.
Carburants : trente années effacées
Les Français n’avaient jamais acheté aussi peu de carburants routiers depuis… 1988, quand le Mur de Berlin était toujours debout et quand le Paris-Dakar et la Coupe Davis passaient en clair à la télévision.
Les Français n’avaient jamais acheté aussi peu de carburants routiers depuis… 1988.
Faut-il s’attendre à des conséquences durables de la pandémie ? L’essor du télétravail « pourrait réduire durablement la part des trajets domicile-travail dans les zones de forte concentration de l’emploi tertiaire », avance Pierre-Emmanuel Bredin, directeur du réseau de distribution français de Total. Mais cette tendance pourrait être partiellement contrebalancée par un recours accru à la voiture, au détriment des transports en commun. L’un dans l’autre, l’impact de la crise sanitaire sur les ventes de carburants ne devrait pas perdurer. L’année 2020 laissera néanmoins des traces pour le secteur pétrolier. Nombre de petites stations-service, déjà fragilisées, risquent de mettre la clé sous la porte . « La crise a aussi mis en lumière un excédent de nos capacités de raffinage », poursuit Olivier Gantois.
La crise du pétrole contraint les majors à des dépréciations géantes
Le TGV revient aux années 1990
Symbole de l’accélération des transports et de voyages plus faciles depuis 1981, le train rapide a souffert comme jamais de la crise sanitaire et des deux confinements. L’état-major de la SNCF s’attend pour l’année à un trafic TGV, sur ses lignes domestiques et internationales, de l’ordre de 65 ou 70 millions de passagers, soit au mieux, moitié moins que le volume de 2019, hors effet grève. Pour retrouver des niveaux aussi bas, il faut remonter au milieu des années 1990.
Fin 1994, Eurostar, nouveau symbole de l’Entente cordiale, voyait le jour au départ de la gare du Nord.
La SNCF plombée par la perte record des TGV
1990 et 2020, quand Roissy est l’équivalent d’Orly
Avec un trafic en recul de 70 % depuis le début de l’année, Roissy-CDG devrait retrouver en 2020 son niveau d’activité de… 1990. Soit environ 23 millions de passagers, contre plus de 76 millions en 2019.
On parlait déjà en 1990 des synergies possibles entre le train et l’avion, dans la perspective de l’inauguration de la gare TGV de Roissy-CDG.
En France, la concurrence du TGV commençait à se faire sentir, tandis qu’Air France s’efforçait de se préparer à l’ouverture du ciel européen, prévue pour 1993, en absorbant ses deux concurrents français, Air Inter et UTA. On parlait déjà des synergies possibles entre le train et l’avion, dans la perspective de l’inauguration de la gare TGV de Roissy-CDG. La crise de 1990 et la récession qui s’ensuivra en 1993 conduiront finalement la compagnie nationale au bord de la faillite, qui ne sera évitée que grâce à une recapitalisation de 20 milliards de francs par l’Etat. Déjà !
Ben Smith : « Cette crise doit être pour Air France l’occasion de se réformer »
Chez Airbus, une décennie d’efforts envolée
Dix ans de croissance perdue : c’est ce que la crise du Covid-19 aura coûté à Airbus, en termes de livraisons et de prises de commandes d’appareils.
L’avionneur, qui totalisait à fin novembre 477 livraisons et 297 commandes, hors annulations, devrait terminer l’année à plus de 500 livraisons et quelque 300 commandes. Soit une baisse de 40 % comparé aux résultats commerciaux de 2019 , conforme aux prévisions établies en avril, avec une production d’A320 ramené de 60 à 40 appareils par mois, et qui devrait rester à ce niveau au moins jusqu’en 2022. Ce qui est n’est pas si mal.
« Si quelqu’un m’avait dit il y a an qu’il faudrait se préparer à livrer 50 A320 par mois, j’aurais pensé avoir affaire à un fou », déclarait le patron d’Airbus de l’époque, Tom Enders.
Une décennie en arrière, l’avionneur se félicitait d’avoir pu passer de 36 à 38 A320 par mois en août 2011, puis 40 par mois à compter de 2012. « Si quelqu’un m’avait dit il y a an qu’il faudrait se préparer à livrer 50 A320 par mois, j’aurais pensé avoir affaire à un fou », déclarait le patron d’Airbus de l’époque, Tom Enders.
Le Louvre d’avant la Pyramide
2,42 millions de visiteurs au Louvre en 2020 : il faut remonter à 1988 pour retrouver un niveau aussi bas, quand les compagnies aériennes low cost ne triomphaient pas, le tourisme urbain n’étant pas si développé, donc quand le niveau de clients internationaux n’atteignait pas encore 70 % du total. En 1988, le musée n’était pas ouvert dans sa totalité, le ministère des finances n’occupait pas encore Bercy mais l’aile Richelieu de l’ancien château parisien des rois de France, restituée à l’institution en 1993. Depuis, on a ajouté l’équivalent de la surface du musée d’Orsay pour exposer des oeuvres. En 1988, Le Louvre n’avait pas développé ses infrastructures d’accueil et les équipes étaient sous-calibrées.
En 1988, le musée n’était pas ouvert dans sa totalité, le ministère des finances n’occupait pas encore Bercy mais l’aile Richelieu de l’ancien château parisien des rois de France
En un peu plus de 30 ans, le Louvre s’est efforcé de donner le goût du musée à un large public, à travers de grandes expositions temporaires, une programmation événementielle, tandis que le tourisme culturel se démocratisait. La réalisation de la Pyramide de l’architecte Pei, inaugurée en mars 1989,