Montrer les stigmates de la souffrance
Pour permettre aux communes de toute la France de passer commande, la fonderie édite un catalogue avec différents modèles. La plupart représente des soldats, dont la posture n’évoque pas forcément la victoire. « Sur les monuments, on ne voit pas de poilus avec le sourire aux lèvres, rapporte Joël Hauer, président de l’association de sauvegarde du patrimoine Les Compagnons de Saint-Pierre. On voulait montrer les stigmates de la souffrance et de la mort. L’un des modèles les plus utilisés, c’est celui du soldat mourant sculpté par Jules Dechin. On en retrouve des centaines à travers la France. »
Même le poilu victorieux, symbole de la France triomphante, présente un visage fermé. « Là encore, constate Joël Hauer, on voulait souligner les blessures cachées derrière la victoire. Le sculpteur Eugène Bénet, lui-même soldat, a d’ailleurs utilisé son propre visage comme modèle. »
« Les monuments aux morts, ce n’est qu’une petite partie de l’histoire »
Depuis 1930, les monuments aux morts ne sont plus d’actualité pour la fonderie. Toutefois, elle a su traverser les époques et continue de développer ses activités. Créée dans les années 1840, elle connait son essor grâce à Antoine Durenne, fondeur d’art, qui rachète l’entreprise en 1857. Ce dernier acquiert rapidement une notoriété internationale : la fonderie réalise notamment les fontaines Wallace, puis plus tard, les fameuses entrées du métro parisien.
« Les monuments aux morts, ce n’est qu’une petite partie de l’histoire de la fonderie, indique Fabrice Jusczcak. Depuis toujours, l’entreprise est spécialisée dans la fabrication de mobilier urbain. Aujourd’hui, on propose surtout des solutions d’éclairage public, des éléments de décorations… Mais on conserve toujours l’aspect artistique qui a fait la renommée de l’entreprise. »