LE TELEGRAMME
Le fonds d’investissement allemand Callista a pris ses quartiers à la Fonderie de Bretagne. Le repreneur croit en l’usine caudanaise et à son savoir-faire.
Comme l’a confirmé la décision du tribunal de commerce de Rennes, le 25 octobre dernier, le fonds d’investissements allemand Callista reprend la Fonderie de Bretagne (FDB), à Caudan, qui annonce dans un communiqué que c’est Kai-Uwe Rüde qui a été nommé à la direction de l’usine.
Un « manager avec plus de 20 ans d’expérience dans la direction de sites de productions ou d’entreprises. Il a notamment redressé la société Globus Gummiwerke, un spécialiste des matériaux pour dispositifs d’étanchéité », décrit Callista.
Une équipe commerciale va être mise en place
Sans dévoiler précisément son projet pour la Fonderie de Bretagne, Callista « prévoit de rétablir la compétitivité de l’entreprise grâce à des investissements significatifs et à une diversification de sa production pour trouver de nouveaux clients et débouchés. Il est prévu de poursuivre les pièces destinées aux clients actuels, mais aussi de développer de nouveaux produits. Une équipe commerciale dédiée va notamment être mise en place ». C’était une demande des syndicats, durant la revue stratégique. Pour rappel, le groupe allemand s’est engagé à ne procéder à aucun licenciement durant 36 mois mais devra au contraire recruter car, selon les syndicats, de nombreuses compétences manquent à Caudan après le départ de dizaines de salariés.
« L’objectif du projet est que FDB soit en position d’opérer de façon autonome sur le marché et s’affirme comme un acteur indépendant dévoué à ses clients. FDB continuera à fournir des produits de haute qualité à une clientèle internationale. Callista est convaincue que FDB a un fort potentiel et que son savoir-faire, incarné par ses salariés, allié à son projet ambitieux, feront la différence », estime le fonds d’investissement.
Je suis terriblement impressionné par la clairvoyance de cette société allemande qui, n’ayant aucune expérience de la fonderie et encore moins de la fonderie fonte, est convaincue que FdB a un fort potentiel… alors que les groupes spécialisés en fonderie qui se sont penchés sur le dossier SBFM depuis 20 ans étaient tous d’un avis contraire.
Par ailleurs, j’ai toujours trouvé curieux que la traduction française usuelle de « Private Equity Company » est « fond d’investissement » alors qu’il s’agit d’une société qui investit des capitaux privés dans l’optique de faire une rentabilité supérieure à celle des industriels. Ben oui, sinon les capitaux privés iraient directement dans la fonderie en question, sans passer par un intermédiaire qui rémunère sa propre structure et ses associés en plus de ses bailleurs de fond. Mais bon, c’est peut-être parce que je ne suis qu’un fondeur et pas un financier…
A propos, quelqu’un se souvient-il d’un exemple dans la fonderie d’une société de taille comparable à FdB ayant fait l’objet d’une reprise par un « fond d’investissement » et qui n’a pas fini en liquidation ?
* Tamaris reprise en 2011 par CVC peut-être ? Ah ben non, liquidée en 2013.
* Fonderie du Poitou par Greybull Capital ? Ah non, seule offre de reprise mais le deal n’a pas eu lieu. Liquidée.
* Valfond reprise par UBS Capital en 1999 ? La liste des liquidations qui ont suivi est longue comme le bras…
* Fonderie d’Aluminium de Dunkerque reprise par American Industrial Partners en 2021 ? Ah, ben non : elle va bénéficier de 40 à 50 millions d’euros d’aide publique (sous forme de prêts remboursables, j’imagine) sous peine de mettre la clef sous la porte cet hiver. Comment va-t-elle pouvoir rembourser dans un marché toujours plus concurrentiel ?
* Fonderie de Raon l’Etape ? Ah ben non, sous contrôle de Carlyle puis d’Apollo, l’effectif fond de 800 à 120 employés, ces derniers sont sauvés in-extremis lors de la reprise par 3 cadres en 2008. Ils emploient moins de 80 personnes actuellement, il me semble. OK : une fonderie non liquidée, mais c’est pas passé loin.
* Halberg Guss en Allemagne reprise par un « fond d’investissement » hollandais en 2011, puis par un fond allemand, puis détenue brièvement par la famille Hastor avant cession à un autre fond allemand dénommé OSA ? Non plus : les deux fonderies de Saarbrücken et de Leipzig employant 2.200 employés ont été liquidées en 2020.
D’autres suggestions ?
PIWI remercie notre ami suisse pour la clairvoyance de ses habituels propos et en particulier pour celui d’aujourd’hui lequel est illustré d’exemples du passé de nombreuses fonderies passées à la trappe.