Dans une Allemagne en récession, les petits constructeurs traditionnels vacillent
La petite pièce sombre du premier étage de l’immeuble en brique sent le vieux bois et le vieux cuir. Autour du bureau, une carafe centenaire, un boîtier d’appareil photo, une crosse de revolver, et surtout d’innombrables pièces de carrosserie et de moteur. Tout ce bric-à-brac témoigne du savoir-faire accumulé par la fonderie d’aluminium Roeders depuis sa création en 1814, à Soltau, en Basse-Saxe.
Cette année-là, la fonderie Roeders évite de peu la faillite. Mais le souvenir de cet épisode douloureux n’a jamais quitté Gerd. Elle est revenue en force ces derniers mois, alors que l’entreprise, qui emploie cinq cents salariés pour 60 millions d’euros de chiffre d’affaires, a subi la violence d’un double choc : la crise énergétique, qui plombe les industries. les grands consommateurs comme les fonderies, et celui du secteur automobile, son principal client, bousculé par les enjeux de la transition électrique. « L’hiver dernier, la situation est devenue extrêmement critique, avec l’explosion des prix de l’énergie et l’effondrement des commandes automobiles., dit Gerd. Nous sommes donc allés voir les constructeurs pour exiger une augmentation des prix d’achat de nos pièces. Nous avons joué dur, nous les avons menacés de non-livraison et de faillite, comptant sur le fait qu’ils n’auraient pas le temps de se tourner vers la concurrence. Et nous avons gagné notre cause. »
Restructurations majeures
Tous n’ont pas résisté à la lame de fond qui déferle sur l’industrie allemande. Selon le site d’information spécialisé Creditreform, le nombre de faillites d’entreprises a augmenté de 23% en 2023 par rapport à l’année précédente. L’augmentation est de 30 % dans l’industrie. La tendance pourrait s’accélérer.
Les grands équipementiers automobiles, clients traditionnels des petites et moyennes entreprises, ont lancé d’importantes restructurations pour réduire leurs coûts : trois mille emplois vont disparaître chez Bosch, sept mille chez Continental, 6 milliards d’euros doivent être économisés chez ZF. Autre entreprise emblématique, le fabricant d’appareils électroménagers de luxe Miele, a annoncé la suppression de deux mille sept cents emplois et le transfert de l’essentiel de la production allemande vers la Pologne, où le coût de la main d’œuvre est moins élevé.