La Dépêche –
La fonderie Gillet embauche deux ouvriers retraités. Henri 73 ans et Manuel Monteiros de Queiros, 68 ans, aident leurs jeunes collègues un à deux jours par semaine. Une façon de transmettre un savoir-faire.
La retraite ? Henri et Manuel n’y ont goûté que quelques mois, voire quelques années. Très vite, ils sont revenus donner un coup de main à leurs collègues et amis de la fonderie albigeoise Gillet, la plus ancienne de France.
À 73 ans, Henri travaille un jour par semaine, 32 heures par mois. Et Manuel deux jours dans la semaine. Tous deux sont aujourd’hui en CDI. Et s’ils évoquent l’idée de s’arrêter un jour, on comprend vite en discutant avec eux que ce n’est pas pour tout de suite. La fonderie et le travail font partie intégrante de leur vie !
Henri et Manuel
Henri Palazi a commencé à travailler en 1964. Après avoir œuvré au Saut du Tarn, il intègre la fonderie Gillet en 1983 où il exerce le métier de mouleur. En 2006, il part en retraite, mais reviendra régulièrement prodiguer ses conseils, avant de reprendre sur service après la reprise de l’entreprise par les salariés en 2014.
Manuel Monteiros de Queiros est entré dans le monde du travail quelques années plus tard que son complice, en 1969. En 1980, il intègre la fonderie Gillet, comme mouleur main. En 2014, il prend sa retraite deux mois avant le dépôt de bilan. Six mois plus tard, il était revenu.
L’amour du travail bien fait !
« Quand on est reparti, ils passaient nous voir en nous disant, faites ça, faites comme ça », raconte Nicolas Pomarède, le directeur de la SCOP. Et puis, un jour, ils sont revenus travailler comme salarié.
Henri a fait ainsi « économiser beaucoup d’argent à la fonderie ». Quand la nouvelle société est repartie, elle n’avait pas le droit d’embaucher. Il n’y avait donc pas de modeleur. Henri aidait à réparer les moules. Aujourd’hui, il forme un jeune depuis deux ans. « Je transmets ce que je sais. Les jeunes n’ont pas la pratique », indique-t-il, tout en avouant à demi-mot, un petit sourie en coin : « dès fois, j’ai faux ». « Je n’ai jamais autant appris qu’avec les anciens. Ils nous donnent des astuces, des petites techniques. Ils nous aident à gagner du temps, à sortir du scolaire », assure Thomas, son collègue aux moules. A tous les deux, ils gèrent plus de 5 000 modèles. « L’essentiel, c’est que je transmette quelque chose, mon savoir-faire », assure Henri.
Henri et Thomas
« La fonderie, j’y ai passé presque ma vie. Il y a du monde qui a tout fait pour la casser, moi je voulais que cela continue. C’est pour ça que je suis revenu », affirme Manuel. Enfin aussi par passion et pour la bonne ambiance. Il aide sur différents postes en apportant son savoir-faire aux plus jeunes.
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Les deux hommes l’avouent. Ils sont revenus parce que l’entreprise avait changé. Le 22 juillet 2014, la fonderie est mise en liquidation judiciaire. Le 18 novembre de la même année, faute de repreneur, 27 salariés sur les 41, reprennent l’entreprise en SCOP.
« La SCOP, ce n’est pas pareil. Avant, il y avait des patrons, maintenant, c’est nous. Quand on perd du temps (le jour où nous sommes venus il y avait un anniversaire), après on le rattrape. C’est naturel », explique Henri. Surtout, il n’y a plus de pointeuse. Et ça, c’est vraiment un symbole de liberté pour eux.
Pour Manuel, la SCOP est une très bonne idée. Selon lui, toutes les entreprises en difficulté devraient être reprises par leurs salariés. « Mais il faut travailler », ajoute-t-il.
Dans tous les cas, à la fonderie, cela a fonctionné. Après quelques années difficiles, aujourd’hui, l’entreprise se porte bien. Les carnets de commandes sont bien remplis, le savoir-faire reconnu. Et chacun vient travailler avec plaisir. On peut parier qu’Henri et Manuel sont encore là pour quelques années !
C’est éffectivement un très bel exemple sur lequel devraient méditer toutes les sociétés qui ont connu de graves difficultés.
Il y a une très belle coopérative en Espagne arrivée au niveau mondial, il s’agit de Fagor filliale de « Corporacion Mondragon » crée en 1956.