« On se dirige vers un plafond de verre » : SUV, la fin des années folles
Les ventes de SUV devraient bientôt atteindre un plateau, pronostiquent les experts. Pour retrouver des volumes et sur la transition vers l’électrique en Europe, les marques vont devoir aussi proposer des modèles moins lourds et moins chers.
Par Lionel Steinmann
La « SUV-isation » du marché automobile a-t-elle atteint un plafond ?
Ces vingt dernières années, ces carrosseries hautes sur roues et très souvent larges d’épaule ont connu un succès foudroyant, ringardisant au passage les monospaces. Mais selon plusieurs experts, la part des SUV dans les ventes est sur le point d‘atteindre son apogée, ce qui devrait ensuite rouvrir le jeu pour d’autres types de modèles.
A ce stade, les statistiques de ventes ne laissent pointer aucun signe de lassitude de la part du chaland. Sur les dix premiers mois de l’année, les SUV représentent 52 % des immatriculations en France, soit trois points de plus qu’il y a un an… et deux fois plus qu’en 2015, d’après les chiffres de la Plateforme automobile (PFA). Un engouement qu’on retrouve sur le reste de la planète : 49 % des ventes mondiales cette année sont des « Sport Utility Vehicles », selon IHS.
Toujours autant de succès
« Le SUV répond à de nombreuses attentes clients, qu’elles soient fonctionnelles ou émotionnelles, détaille Sankar Vigneswaran, directeur de la prospective produit pour le groupe Renault. Les acheteurs apprécient la position haute sur la route, le sentiment de sécurité et de robustesse qui se dégage de ces modèles, ainsi que la praticité et l’espace intérieur. »
Les SUV n’ont pourtant pas bonne presse, et des associations comme WWF ou Transport & environnement publient régulièrement des rapports stigmatisant leur coût environnemental, ou leur dangerosité pour les piétons et les cyclistes. Cela n’a pas altéré leur image auprès des amateurs d’automobile. « 65 % des internautes qui regardent des vidéos de voitures sur YouTube ont une perception positive des SUV, contre 15 % qui pensent l’inverse, rapporte Eric Champarnaud, fondateur du cabinet C-Ways. Ces chiffres n’ont pas évolué depuis 2023. »
Une offre qui s’est uniformisée
« Les ménages apprécient les SUV au point d’accepter de payer un premium par rapport au modèle équivalent en version berline, ce qui plaît évidemment aux constructeurs. Mais cette entente a fini par uniformiser l’offre, avec le risque d’intéresser de moins en moins les consommateurs. Les constructeurs ont donc intérêt à se remettre à innover, pour se démarquer des canons du SUV. »
La question n’est pas seulement esthétique, souligne l’expert : « Les formes massives et le poids des SUV n’en font pas la carrosserie idéale pour prendre le virage du 100 % électrique, car ces deux éléments pèsent sur l’autonomie de la voiture, poursuit-il. Si l’on ajoute à cela le prix de la batterie, un SUV électrique n’est pas dans les moyens de la grande majorité des ménages français. Cela devrait conduire les constructeurs à proposer plus de variété, même si le SUV restera la forme dominante. »
