Renault, Ford ou GM : Carlos Tavares et Stellantis se disent prêts pour une mégafusion
Le patron de Stellantis agite la menace chinoise pour inciter à la consolidation du secteur dont il pourrait profiter. Et critique en creux la stratégie de Renault.
A quinze jours de la présentation de résultats financiers qui promettent d’être parmi les meilleurs du secteur, et trois ans après sa création, Stellantis se met sur le pied de guerre. Son dirigeant, Carlos Tavares, prend la posture du consolidateur potentiel de l’automobile occidentale.
« Dans ce monde darwinien, les gars qui sont capables de protéger leurs résultats » sont ceux qui l’emporteront, a-t-il martelé dans un entretien donné à l’agence Bloomberg, reprenant son antienne préférée. « Tant que vous voyez mes chiffres au niveau adéquat, vous pouvez en conclure que je suis prêt pour tout type de consolidation. »
Jamais deux sans trois
Le passé de Carlos Tavares parle pour lui. Le Portugais, qui a commencé sa carrière chez Renault, a remis sur pied PSA entre 2014 et 2016, puis racheté Opel en 2017 . Avant de fusionner son groupe, en 2021, avec celui des Agnelli , FCA (Fiat-Chrysler). De quoi donner naissance à un grand de l’auto, présent en Europe et aux Etats-Unis : Stellantis.
Trois ans après, et alors que l’essentiel des synergies organisationnelles tirées du rapprochement ont été réalisées, Carlos Tavares prépare les esprits à une troisième opération capitalistique.
« Le fait même de ne pas exclure cette hypothèse force toutes les parties prenantes, analystes, fonds activistes et actionnaires, à se poser la question d’une consolidation, observe Bernard Jullien, expert du secteur automobile. Et les conclusions à en tirer ne tournent pas en sa défaveur. »
Le péril chinois
Le temps de Carlos Tavares est compté. Il n’a plus que deux ans pour réaliser l’ultime coup de sa carrière déjà riche et marquer définitivement l’histoire de l’automobile mondiale. Son mandat à la tête du groupe s’achèvera le 15 avril 2026, et sonnera pour lui l’heure de la retraite.
Les choses sont bien faites. Le patron estime justement que le temps est venu d’une grande opération. Son levier pour accélérer les choses : encore et toujours la menace chinoise .
« Si l’industrie automobile ne bouge pas, elle disparaîtra sous l’offensive chinoise », prévient-il. « Les groupes qui ne se sont pas préparés [à la concurrence chinoise sur l’électrique] font face à des difficultés, ce qui signifie que nous devons, chez Stellantis, être prêts, a-t-il insisté auprès de Bloomberg. Ceux qui n’auront pas fait leurs devoirs en matière de réduction des coûts sont ceux qui finiront dans le pétrin. »
Commentaires sur Renault
Son regard porte aussi bien vers Boulogne-Billancourt que vers Detroit, le siège des américains Ford et GM. L’ancien numéro deux de Renault époque Carlos Ghosn ne se prive pas de commenter la stratégie de son homologue Luca de Meo. Celui-ci a annoncé mardi renoncer à introduire en Bourse sa toute nouvelle filiale spécialisée dans l’électrique et les logiciels, Ampere, un élément central de sa stratégie.
Soulignant la petite taille de son concurrent (2,2 millions de ventes en 2023, environ trois fois moins que Stellantis), Carlos Tavares se place implicitement en chevalier blanc.
Renault, a-t-il glissé à certains interlocuteurs ces dernières semaines, fait face au risque de se laisser croquer par son partenaire chinois Geely (qui détient déjà Volvo). A moins, ajoute le dirigeant, que ce ne soit par Volkswagen, avec qui la marque au losange serait en discussion pour développer en commun une petite citadine électrique à moins de 20.000 euros.
Problèmes de concurrence
Le patron de Stellantis observe également, et peut-être même davantage, la situation de l’autre côté de l’Atlantique. Son groupe y réalise près de 60 % de ses profits avec les marques Chrysler, RAM ou Dodge.
Quand on lui demande s’il s’intéresse à G ou Ford, qui valent depuis l’année dernière moins que Stellantis en Bourse, il n’exclut rien. « Tout dépendra de la situation, lâche-t-il. Le seul prérequis est [qu’un éventuel rapprochement] soit gagnant-gagnant, et que cela soit fait d’une manière amicale. »
Quelle que soit la cible réelle de Stellantis, une consolidation risque de se heurter aux autorités de la concurrence. Aux Etats-Unis, sa marque RAM est la troisième sur le marché du pick-up, que Ford domine, suivi de GM. Intégrer un rival américain permettrait à Stellantis de terminer sur le podium des plus grands constructeurs mondiaux, derrière Toyota mais côte à côte avec Volkswagen.
Quant à un hypothétique rachat de Renault par Stellantis ne serait pas sans poser d’inextricables complications. Les deux constructeurs maîtrisent à eux deux près de 60 % du marché des voitures particulières dans l’Hexagone et pas moins de 40 % en Europe. Les deux groupes dominent encore plus outrageusement le très lucratif marché des utilitaires, tenant fermement près de 70 % du marché français.
La question du marché pertinent
Carlos Tavares a anticipé cette remarque. Son terrain de jeu, c’est le monde entier, et l’équipe adverse est chinoise, répète-t-il en substance. Les autorités de la concurrence doivent donc lui laisser les coudées franches. Ce débat sur le « marché pertinent » rappelle le dossier Alstom, la Commission européenne ayant interdit au français de fusionner avec Siemens . Avant d’ accepter une opération avec Bombardier .
Stellantis n’en possède pas moins les moyens de ses ambitions. « La montagne de cash du groupe lui offre à la fois un certain confort et des options », glisse Michael Tyndall, analyste chez HSBC, dans une note récente. Il évalue la trésorerie nette du groupe à 26,5 milliards d’euros à fin 2023. C’est plus de deux fois la valorisation actuelle de Renault en Bourse, et la moitié de celle de Ford ou GM.
Guillaume Guichard
Si il y a une seule personne qui connaisse le monde de l’automobile: C’EST LUI ! et ce qu’il dit est fondé.
Il va falloir s’unir sans hésiter face aux chinois et à leurs quelques 200 constructeurs nationaux !
Pour développer de l’automobile il faut de l’argent et beaucoup d’argent donc les occidentaux doivent s’unir .
Stellantis pèse aujourd’hui environ 6,6 millions d’automobiles et un cash de 26,5 milliards d’euros soit deux fois la capitalisation de Renault qui ne pèse plus que 2,2 millions de voiture, alors il est évident qu’avant sa retraite et à priori il ne jouera pas les prolongations il veut faire un coup. et un gros, un de ceux qui fera de son groupe le leader mondial incontesté.
Ce peut être Ford ou GM mais également Renault dont il est issu et dont il ne croit à sa nouvelle stratégie et il a certainement raison.
Séparer le thermique de l’électrique est une erreur, c’est le premier qui fera manger le second pour encore pas mal d’années. De Meo se trompe et il le sait, Renault est revenu à sa taille de départ avant l’alliance de Louis Schweitzer, trop petit et manquant de de capitaux pour investir.
Sauf erreur Stellantis est à suivre dans les mois qui viennent.