La Dépêche de Louviers
Manoir France en quête de jeunes fondeurs pour assurer l’avenir en Normandie
En proie à des difficultés de recrutement, Manoir France a organisé une visite pour les élèves du lycée Colbert, de Petit-Quevilly (Seine-Maritime), vendredi 7 février 2025.
Manoir France (ex Manoir Industries) veut redorer le blason de la fonderie. Alors que ce groupe historique de la métallurgie normande poursuit son redressement, depuis la reprise par le britannique Paralloy, en juin dernier, quinze élèves de seconde MREMI (Métiers de la réalisation d’ensembles mécaniques et industriels) du lycée professionnel Jean-Baptiste Colbert, à Petit-Quevilly (Seine-Maritime) étaient invités pour une visite de ses installations, à Pîtres (Eure), vendredi 7 février 2025.
« On sort d’une période difficile. Cela fait 10 ans qu’on n’a pas eu d’investissement, donc soyez conscients que vous allez trouver des ateliers qui ne sont parfois pas au niveau où ils devraient être », avertit Pierre-Emmanuel Nioche, responsable de l’Amélioration continue.
Avant la visite à proprement parler, le salarié de Manoir France a proposé aux élèves une présentation des activités de la société, créée en 1796, dans l’est de la France et présente à Pîtres depuis 1917. Elle fabrique principalement des pièces pour les centrales nucléaires et la pétrochimie. « On livre des pièces qui peuvent faire jusqu’à 18 mètres de long ! De 2 kg, jusqu’à plusieurs tonnes », explique Pierre-Emmanuel Nioche.
Trente-quatre tonnes d’aciers chaque jour
Les élèves ont pu visiter les différentes parties du site, comme les laboratoires, le stockage, le modelage… Et surtout les ateliers, où trente-quatre tonnes d’acier en fusion à 1 700 degrés sont coulées quotidiennement. « Notre premier souci, c’est la qualité, pas la cadence. On n’a pas le droit à l’erreur, il faut que ça soit bon du premier coup, souligne Pierre-Emmanuel Nioche. On n’a aucune pièce standard. Chaque commande est une nouvelle aventure. On est des artisans de la métallurgie. »
L’après-midi, les élèves pouvaient poser leurs questions à trois professionnels, parmi les quelque 200 métiers présents sur le site. « Ils rencontrent des gens qui ont un cursus similaire au leur », fait valoir le cadre de Manoir Industries.
Un partenariat renforcé
Participation aux journées portes ouvertes, à des tables rondes et autres événements organisés au lycée… L’entreprise veut « approfondir » ses liens avec l’établissement scolaire, dont elle est d’ailleurs membre du conseil d’administration depuis cette année. « On est l’un des sept établissements qui proposent l’apprentissage de la fonderie en France », rappelle Benoît Masseron, directeur délégué aux formations professionnelles et technologiques du lycée Jean-Baptiste Colbert.
Pour la fonderie, parfois les enfants sont motivés et ce sont les familles qui disent ‘non’. ‘C’est sale, ça pue, c’est risqué’.
Malheureusement, la filière souffre d’un déficit d’image. « Pour la fonderie, parfois les enfants sont motivés et ce sont les familles qui disent ‘non’. ‘C’est sale, ça pue, c’est risqué’, relate Benoît Masseron. On veut montrer qu’au contraire, c’est propre, c’est organisé et que les risques sont maîtrisés. Ce sont des métiers passionnants, au contact de la matière, grâce auxquels il y a des voitures, des réfrigérateurs, etc. C’est notre quotidien, l’industrie. »
Et pour l’entreprise métallurgique, l’enjeu est de taille. « S’il n’y a plus de jeunes dans la section, elle ferme et on perd un savoir-faire sur le territoire », alerte Pierre-Emmanuel Nioche.
Une cinquantaine de postes vacants
De son côté, Sylvain Vaucel, le proviseur du lycée Colbert, regrette d’avoir trop souvent affaire à des élèves « qui font un choix de proximité » géographique. « On va travailler pour aller chercher des jeunes sur un territoire plus large, avec une réelle motivation pour travailler dans l’industrie », annonce-t-il. Dans son viseur, entre autres : les jeunes de l’agglomération Seine Eure.
On peut vraiment faire briller les yeux des jeunes en leur montrant ce qu’on fait.
« Les entreprises ne savent pas aller au devant des jeunes avant l’entrée au lycée », déplore également, Alix Leclech, directrice des ressources humaines de Manoir France. Alors que sa société emploie environ 450 salariés, une cinquantaine de postes restent actuellement ouverts en production. « Ce n’est pas le métier le plus facile au monde, mais on peut vraiment faire briller les yeux des jeunes en leur montrant ce qu’on fait, estime la DRH. Une coulée d’acier en fusion, c’est magique. »
Mais son principal argument : les perspectives à long terme. « Ces métiers ont une technicité irremplaçable par les machines. Donc ce sont des métiers d’avenir, on aura toujours besoin de la métallurgie. »