La fonderie et Piwi

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Par : piwi
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vendredi 12 Fév, 2021
Catégorie : Technique

Le luxe et les métaux précieux

Bretagne – parure en or 1900 avant notre ère.
Les métaux précieux sont utilisés depuis des millénaires pour les objets de luxe. Ainsi l’or a été exploité depuis le néolithique et au moins 6000 ans. Ce métal précieux semble servir presque partout dans les civilisations anciennes (Egypte, Grèce, …) à la parure des puissants et aux cérémonies religieuses. L’assimilation de l’or au disque solaire divinisé en est peut-être un des leviers communs les plus puissants. Pendant très longtemps, les anciens produisirent de l’Electrum (métal à l’état natif) mélange de 40 à 90 % d’or et de 10 à 60 % d’argent (et de divers autres impuretés métalliques) ou du bronze de Corinthe (or, argent et cuivre). Pendant des milliers d’années, les alliages utilisés dans le secteur du luxe furent essentiellement limités à l’or et à l’argent. Ce n’est que beaucoup plus récemment que d’autres métaux, davantage high-tech, et issus de l’industrie, sont utilisés (acier inoxydable, platine, titane, verres métalliques, …) en parallèle avec l’or et l’argent.

Les propriétés des alliages du luxe
Alors que les propriétés des alliages utilisés dans l’industrie sont avant tout fonctionnelles (tenue à la corrosion, limite d’endurance, …, tenue à chaud ou à froid) et facilement objectivables, il en est tout autrement dans le monde du luxe où d’autres critères arrivent en tête. Ainsi, le coût élevé de la matière première (50 €/g pour l’or) associé à son prestige est clairement un atout pour un objet de luxe alors qu’il est clairement un critère limitant dans l’industrie. Un autre atout pour le luxe peut être la densité élevé d’un alliage, preuve de solidité et de pérennité. Enfin, des références historiques (l’or et l’argent furent pendant des millénaires réservés à une élite) sont aussi intéressantes pour donner du sens à un objet de luxe.

Les différents objets de luxe en métal précieux.

Les alliages industriels et les alliages du luxe
Les alliages utilisés dans le secteur du luxe sont globalement les mêmes que ceux utilisés dans les secteurs industriels (automobile, aéronautique, …). Cependant, le luxe utilise préférentiellement des métaux et alliages à forte valeur de possession (or, argent, platine, palladium, rhodium, …) sans délaisser néanmoins des alliages plus traditionnels (acier inoxydable, bronze, …). Par contre, certains alliages largement utilisés dans l’industrie (aluminium, zinc, fonte,…) ne sont pas ou très peu utilisés dans le luxe car trop courant dans les objets traditionnels et ne bénéficiant donc pas d’une image de prestige.

Quantité de métal précieux dans le luxe et dans l’industrie

Il est intéressant de comparer (tableau ci-dessus) les quantités de matériaux utilisés dans le luxe par rapport aux mêmes matériaux utilisés dans l’industrie. L’or est sans conteste le matériau dont la part de marché dans le luxe est la plus élevée (52 %) suivi par l’argent (40%) et le platine (38 %). L’or présente de plus la particularité d’être stocké (lingots, pièces, …) dans les réserves des banques centrales à hauteur de 30 % environ de sa production annuelle. Remarquons également que les quantités d’argent utilisés annuellement sont beaucoup plus importantes que les quantités d’or, ce qui explique le différentiel de prix du métal.

Le platine, dont la production annuelle est très réduite (190 t/an) est également commercialisé à un prix très élevé (24€/g) alors que le titane dont la production est relativement importante bénéficie d’un faible prix de métal. Enfin, signalons que le rhodium est l’un des métal les plus onéreux (160 €/g environ) et est donc utilisé dans certains objets de luxe (bague, montre, ..).

Le luxe, le développement durable et l’or-éthique
Fonderie47 recycle des armes en bijou de luxe.
Depuis quelques temps déjà, les industries du luxe, attentives aux évolutions sociétales, s’engagent dans des actions éthiques, écologiques ou liées au développement durable. Ainsi, au-delà du matériau lui-même, sa provenance et son image peut avoir une importance capitale. Ainsi la société fonderie47 recycle des armes à feu (fusils AK47 récoltés en Afrique dans des pays en guerre) pour, en les refondant, réaliser des objets de bijouteries en Inox (bracelets, montres, …) qui ont alors – au-delà de leur design – un contenu éthique incontestable et une histoire propre à haute valeur ajoutée émotionnelle. D’autres distributeurs ou groupes de luxe mettent en avant que leurs bijoux en or proviennent d’or recyclé ou que l’approvisionnement en or est issue de mines d’or éthiquement certifiées (certification Fairmined). Cette évolution, encore embryonnaire, s’inscrit, nous semble-t-il, dans une démarche de fond.

Les différents types d’or

Composition des différents types d’alliages à base d’or.

Les objets en or dans le monde du luxe peuvent en or massif ou simplement plaqués or. Il existe également une diversité des alliages à base d’or. On distingue ainsi (tableau ci-dessus) l’or jaune conventionnel, l’or rose et l’or rouge (à forte teneur en cuivre), l’or gris (proche de l’or jaune mais sans argent, l’or blanc (avec du palladium) et l’or blanc (avec une couche de rhodium en surface) et des alliages anciens de type Electrum (or et argent) à la composition plus fluctuante en fonction des approvisionnements et des savoir-faire locaux.

Le zirconium et le zircone

Le zirconium est utilisé dans l’industrie du nucléaire ou sous forme d’alliages tels que le Zircaloy (avec de l’étain, du fer et du chrome), mais également dans l’industrie du luxe. Il est en effet utilisé afin de donner un aspect « or » aux boitiers de montres, avec un coût de revient inférieur au placage d’or. De plus, le zircone, ou plus précisément l’oxyde de zirconium, produit artificiellement est utilisé, quand il est brillant, dans la bijouterie du fait de sa ressemblance avec le diamant. Il peut être de diverses couleurs (rose, noir, blanc …). Il est quelquefois aussi appelé faux diamant synthétique.

Les matériaux des bagues

Bague titane et or rose – luxe.
La bague est l’un des bijoux les plus communément portés. De nombreux matériaux métallique sont utilisés pour sa confection : l’or, le titane, le tungstène, le platine, le rhodium, le palladium, l’argent, l’acier. Dans certains cas, on utilise un mélange de plusieurs métaux selon les zones de la bague (titane et or rose, titane et tantale, …) pour donner un effet visuel supplémentaire. Enfin, un métal (de type titane) peut être mélangé à un matériau non métallique (bois précieux) pour donner une touche naturelle à la bague et adoucir alors l’aspect plus froid du métal.

Les matériaux des boitiers de montres de luxe
Les montres de luxe, elles aussi, peuvent être réalisées dans de nombreux matériaux. On trouve ainsi de l’or, de l’argent, du platine, des alliages de bronze ou de laiton, mais aussi des verres métalliques amorphes pour les boitiers. Au-delà du boitier, les multiples pièces composant la montre peuvent être en acier, en Invar (FeNi36) pour les spiraux. Cependant, le laiton et l’acier restent les matériaux les plus courants dans un mouvement d’horlogerie. En effet, les pignons d’acier et les roues en laiton ont un excellent coefficient de frottement.

La platine en titane damassé et personnalisée
Montre en titane damassé – luxe.
Pour un boitier de montre très haut de gamme, GENUS a créé une montre avec un garde-temps en titane damassé. La fabrication d’acier damassé porte le nom de Mokume-gane au Japon pour la fabrication de lames de katana depuis le 17e siècle. Le damassage est une opération de forge qui consiste à marteler puis à replier la matière un grand nombre de fois pour lui donner un aspect très particulier et entièrement nouveau. En effet, chaque découpe, chaque biseau entamé dans la tranche du damassé en révèle les strates accolées, les formes, les ondulations, les caractères uniques de la superposition de couches. De plus, afin d’enrichir encore l’aspect de ce matériau de base, les créateurs utilisent des empilements de différents alliages de titane, qui ont chacun une teinte et une réaction progressive en fonction de la durée d’exposition à la chaleur. Le rendu chamarré est d’autant plus florissant qu’il est augmenté par un traitement thermique final. Celui-ci détermine la tonalité générale du bloc de métal, et ses subtiles différences de couleur. Enfin, chaque futur acquéreur de chaque montre a la possibilité d’assister aux opérations de révélations de damassage à la flamme au sein de l’atelier à Genève. Il pourra alors intervenir directement à la mise en couleurs et décider les finitions de surface souhaitées : mat, satiné ou poli. Lui seul aura accès aux secrets de fabrication et au coup de main des artisans.

Les verres métalliques
Les alliages de cette nouvelle classe de matériaux sont à structure amorphe (sans structure cristalline défini). Bénéficiant d’un point de fusion plus bas, ils possèdent une résistance mécanique très élevée. Parce qu’ils possèdent des propriétés spécifiques et qu’ils sont rares, les verres métalliques sont utilisés dans des produits de luxe ou haut de gamme et se prêtent bien aux applications horlogères. Ainsi Apple a-t-il acheté l’exclusivité du LiquidMetal pour ses produits (iphone, ipad). L’horlogerie a par contre déjà mis sur le marché des boitiers en verre métallique. Les verres métalliques présentent en effet une dureté élevée et sont donc quasiment in-rayable, ce qui augmente l’intégrité des surfaces en cas de chute, chocs ou coups divers.

La marque Omega utilise le verre métallique LiquidMetal pour ses montres avec une alternance entre les parties métalliques et la céramique. Liquidmetal®Technologies Inc. et le Swatch Group SA ont ainsi signé un accord de licence exclusif pour l’utilisation de l’alliage Liquidmetal par le Swatch Group dans le monde entier. Au sein du Swatch Group, la technologie Liquidmetal a été utilisée pour la première fois en 2009 déjà pour la montre Omega Seamaster Planet Ocean, et ensuite en 2010 chez Breguet pour le Réveil Musical.

Le bronze
Vers 2005-2010, la tendance pour des objets de luxe de type « authentiques / robustes / artisanaux » a fait irruption. Réputé pour sa robustesse, le bronze est largement revenu sur le devant de la scène horlogère ces dernières années avec un style rétro contemporain. Le bronze est en effet apprécié pour sa teinte chaude, sa patine qui évolue au fil du temps, et son aspect original comparé aux métaux plus traditionnels (acier, …) et enfin il reste plus abordable que les métaux précieux. Comme la mode, l’horlogerie reste un éternel recommencement. Les périodes économiques instables favorisent d’autant plus le retour des manufactures à leurs valeurs sûres, à ces icônes du passé qui s’invitent dans les collections contemporaines.

Les bi-matériaux
Bi-matériau cuivre aluminium et acier aluminium par voie de fonderie.
Parce que l’innovation a toujours fait partie de l’ADN du luxe, les bi-matériaux avec des couleurs et des matériaux contrastés peuvent avoir une place dans les accessoires du luxe. CTIF a par exemple développé, à partir de sa technologie de structure lattice par voie de fonderie, des bi-matériaux acier-aluminium ou cuivre-aluminium.

Les procédés de fabrication
Les pièces en métaux précieux du secteur du luxe utilisent de nombreux procédés de fabrication; l’usinage pour les boitiers de montre, la fonderie en cire perdue pour la bijouterie, la joaillerie et l’orfèvrerie, le décolletage, la soudure, l’estampage, …

La fabrication additive et le luxe
Bracelet en or gris imprimé en SLM.
Parce qu’elle permet de réaliser facilement des productions unitaires de formes complexes, et que les objets du luxe (montres, bijoux, …) sont souvent de petite taille, la fabrication additive métallique (SLM) offre des opportunités dans ce secteur. Si la diversité des matériaux est encore limitée, on peut penser que dans le futur, la fabrication additive occupera une part de marché non négligeable dans la réalisation d’objets de luxe. En particulier, la fabrication additive offre une liberté de forme inégalable pour les créateurs et les designers de bijoux et permet de plus de personnaliser la géométrie à chaque client, ce qui permet de produire des objets uniques.

Les enjeux qualité du luxe
Dans le luxe, tous les défauts d’aspect (rayures, porosité, oxydes en surface, …) sur pièces sont inacceptables. Ces défauts peuvent être dus à des inclusions dans la matière première en fusion, au process de transformation lui-même, mais également aux opérations de post-traitement (parachèvement, revêtement de surface, …). Si dans un contexte industriel classique, la non qualité est couteuse, elle l’est d’autant plus avec des alliages précieux et le moindre rebut a alors des conséquences économiques très importantes.

Le made in France dans le luxe

Chiffre d’affaire des marques de luxe.
La France est le leader mondial du luxe avec 4 grands groupes (LVMH, Kering, L’Oréal Luxe et Hermés) dans le top ten mondial. Le luxe génère en France, tous produits confondus, un chiffre d’affaire annuel de 154 milliards d’euros. Les objets de luxe sont souvent fabriqués en France pour plusieurs raisons. Tout d’abord, ces objets bénéficient de l’image du Made In France, gage de qualité et d’art de vivre à la française dans l’imaginaire des clients. Les filières de fabrication sont donc souvent localisées en France. Ensuite, le luxe faisant l’objet d’une intense contrefaçon (Chine, …), la fabrication en France limite ou du moins ralentit fortement la copie. Enfin, alors que le prix de la main d’œuvre en France et en Europe peut s’avérer dans certains cas pénalisant pour les produits bas ou moyen de gamme, ce surcout est beaucoup moins problématique pour les objets du domaine du luxe où le prix de vente est par nature beaucoup plus élevé.

Les futures tendances du luxe
Dans un proche avenir, plusieurs tendances pourraient se dessiner. On peut en premier lieu imaginer la généralisation de l’utilisation de matériaux écoresponsables et lié au développement durable (mine eco-certifiée, or recyclé, projet de développement social dans les zones minières, …). Le luxe, qui ne cultive pas la production de masse, mais au contraire privilégie les faibles tirages et les niches, devrait pouvoir faire un très large usage de la fabrication additive métalliques (SLM) afin de profiter de la liberté géométrique et de la possibilité d’être très réactif sur le marché et de personnaliser à l’extrême les objets. Enfin, pour se différencier, de nouveaux matériaux issus de la high-tech pourraient voir le jour soient seuls (alliages intermétallique, alliage à haute entropie, acier haut de gamme, alliage aluminium/or, …) soient en association (or/HEA, or/bois, or/pierre, …) avec des matériaux non métalliques dans certains cas. La gamme des matériaux utilisés dans le luxe devrait donc se diversifier avec la possibilité de faire de l’alloy-design (élaboration métallurgique par calcul).

Développer des nouvelles solutions innovantes avec le CTIF
Par sa connaissance de la métallurgie, des process de transformation (fonderie cire perdue , SLM, forge, …) et sa réponse aux besoins spécifiques au secteur du luxe (qualité, innovation, différenciation, …, confidentialité), CTIF accompagne les industriels du luxe dans leurs projets de R&D ou d’optimisation de la qualité de leurs produits métalliques.

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1 commentaire pour : "Le luxe et les métaux précieux"

  1. Le Covid-19 n’a pas coupé l’appétit des Français pour les bijoux et les montres

    Si les ventes dans l’Hexagone en horlogerie-bijouterie-joaillerie ont reculé de 14 % en 2020, la demande des Français est restée forte, compensant en partie pour le secteur l’absence des touristes étrangers.

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