Les six semaines de grève aux Etats-Unis ont coûté près de 3 milliards de dollars aux trois constructeurs automobiles. Ces derniers vont devoir s’adapter pour rester compétitifs. Cela risque de peser sur l’emploi.
Des hausses de salaires de 25 % en quatre ans et demi ; une grille salariale réunifiée ; de meilleures retraites ; la titularisation des contrats courts ; et même une réouverture d’usine. Après six semaines de grève, les ouvriers de l’automobile ont décroché des revalorisations comme on n’en avait plus vu depuis des décennies à Detroit.
Pour Ford, Stellantis et General Motors, qui ont signé l’un après l’autre des projets d’accord avec le syndicat UAW depuis la semaine dernière, le coût de ce mouvement social est élevé. Le paysage concurrentiel aux Etats-Unis va se reconfigurer, car les constructeurs vont devoir s’adapter à la nouvelle donne.
Une perte ponctuelle de 2,9 milliards de dollars
Ces six semaines de grève ont fait chuter la production entre 175.000 à 250.000 véhicules, selon Goldman Sachs.
Stellantis a enregistré un trou de 3 milliards d’euros dans son chiffre d’affaires, mais se targue d’avoir minimisé les dommages sur le résultat avant impôt à moins de 750 millions d’euros. « Le marché américain est clé pour nous, mais nous y sommes moins exposés que nos deux concurrents »,
2 milliards de dollars par constructeur en 2028
Mais dans cette grève, ce sont surtout les lendemains qui vont coûter cher. Ford estime que l’accord pourrait renchérir de 850 à 900 dollars chaque nouveau véhicule sortant des usines à l’horizon de la fin du contrat UAW, en mai 2028.
Stellantis n’a pas souhaité préciser combien lui coûterait l’accord sur le long terme. « Une hausse des salaires de 25 % sur quatre ans entraînera une réduction de la marge brute de 170 points de base (1,7 %) ».
Les futurs membres du syndicat
Ce renchérissement des coûts va profiter à court terme aux concurrents des « Big Three » implantés aux Etats-Unis, notamment aux asiatiques Hyundai, Kia, Nissan, Toyota, et aux européens Volkswagen et BMW. Le syndicat UAW n’a pas réussi à percer dans leurs usines. De même, chez Tesla, le PDG Elon Musk a réprimé la tentative de syndicalisation du site de Fremont en Californie.
Shawn Fain, le président du syndicat, veut croire que les ouvriers de Tesla, Toyota et Honda sont « les futurs membres de l’UAW ».
Quant aux « Big Three », ils n’ont plus d’autre choix désormais que de s’adapter ou de s’enfoncer avec leur lest. Ils ont d’ores et déjà annoncé des plans de réductions de coûts, notamment une décélération des investissements dans l’électrique, afin de ne pas brûler trop rapidement leur cash.
Moins d’emplois aux Etats-Unis
Ils vont également intégrer les nouveaux paramètres salariaux dans leurs décisions d’implantation. « Les constructeurs américains, qui supportent déjà les coûts salariaux les plus élevés du secteur, devraient à l’avenir construire leurs futures usines à l’extérieur des Etats-Unis »,. En s’installant au Mexique, ils pourront encore bénéficier des subventions du plan « made in America » de Joe Biden.
Mais les « Big Three » vont probablement aussi tenter de tirer parti du virage vers l’électrique pour transformer en profondeur leur base de coûts. Les nouvelles lignes de production ont besoin de moins de main-d’oeuvre. La robotisation va s’accroître. Et l’UAW n’est pas encore assurée de régner sur les usines de batteries créées conjointement avec des industriels coréens.
Ce processus de transformation sera la clef de la compétitivité pour « l’après » : lorsque la montée en charge des volumes fera du véhicule électrique non plus un boulet, mais la source des profits des constructeurs traditionnels.