En dépit de toutes les démonstrations effectuées et du soutien technique, commercial et industriel apporté par des partenaires extérieurs, la préfecture et les administrations seront restées sourdes.
C’est donc un savoir-faire, des emplois et une activité industrielle qui disparaissent. Encore une fonderie française qui ferme ses portes.
En 2007 l’entreprise, alors en redressement judiciaire repart in extremis grâce au soutien financier d’un actionnaire.
Cependant, l’amateurisme des cadres dirigeants (clientélisme, absence d’investissements, contrats commerciaux mal négociés…) précipite l’entreprise vers sa chute malgré l’injection massive de fonds par l’actionnaire. En 2012, il abat sa dernière carte et fait appel à Yann Evain, consultant extérieur pour faire un audit approfondi de l’entreprise. Devenu président du directoire, il initiera une série de réformes structurelles et une réorganisation complète de tous les services.
De nouvelles personnes sont embauchées et la stratégie peut être déployée. Rapidement les réformes entreprises portent leurs fruits (basculement vers un management participatif, élimination des contrats commerciaux déficitaires, amélioration de la productivité,…) mais en juin 2014, l’un des deux fours de fusion de l’usine prend feu.
En raison de la lourdeur des procédures avec l’assurance, l’arrêt planifié de 4 semaines durera malheureusement 5 mois.
Le volume de production baisse, les retards de livraison s’accumulent et les dettes s’alourdissent. Faute de liquidités, la stratégie mise en œuvre depuis plusieurs mois ne peut s’épanouir.
Finalement, l’entreprise est mise en redressement judiciaire le 21 janvier 2015 sous la tutelle d’un administrateur.
Avec une capacité de production retrouvée et un carnet de commandes remplis, l’entreprise livre mais ne se fait pas payer. L’organisme de financement augmente ses seuils de garantie et revoit à la baisse ses paiements ce qui assèche la trésorerie de la fonderie.
Fin mars 2015, lors d’une audience au tribunal, l’administrateur refuse le plan de continuation et propose la liquidation judiciaire. Quelques repreneurs se manifestent mais aucune offre sérieuse n’est formulée. L’idée de scop germe.
Dès début avril, un comité de pilotage se forme et contacte l’union régionale des scops de l’ouest (URSCOP). Une présentation générale est faite aux salariés le 9 avril 2014 par leur déléguée régionale.
C’est le début de l’élaboration du projet.
Rapidement l’URSCOP exige un audit technique et commercial (25 000 €) qui ne pourra pas être financé.
A partir de ce moment, l’accompagnement de l’union s’arrête, sans avoir vraiment commencé. Quelques conseils malavisés de leur part et leur complet désengagement entraineront les porteurs du projet de difficultés en difficultés. De surcroit, ils font mauvaise presse auprès de la région, de la préfecture et des banques coopératives. Tous refuseront de considérer le projet avec sérieux.
Les salariés s’entourent alors d’un cabinet comptable lavallois, dont l’expertise professionnelle est reconnue ; les financements sont trouvés, des partenaires industriels intègrent le projet.
Construit sur 3 ans, le projet s’articule autour de 3 axes : remise aux normes et amélioration des conditions de travail prévus avant le redémarrage, puis modernisation des lignes de production et intégration de valeur ajoutée. Les salariés qui ont construit le business modèle obtiennent le soutien d’experts en fonderie qui valident le sérieux du projet.
Cependant, malgré toutes les démarches entreprises et tous les interlocuteurs contactés, le projet n’avance pas. Pour surmonter cette surdité généralisée, les salariés font appel à un avocat spécialisé avec qui ils rencontrent les différentes instances, mais en vain.
Les autorités enterrent définitivement l’entreprise, début juillet.
Fonderie Mayennaise disparait en laissant derrière elle 1,8M€ de commandes et 1 M€ de facturation à recouvrer.
Ce sont 50 emplois qui ne seront pas créés et 6 M€ de CA qui ne profiteront pas à l’économie locale. Sans oublier la délocalisation forcée et la perte définitive du savoir-faire.
Cette fonderie unique dans le grand ouest, réalisait des pièces complexes et disposait d’un vrai savoir-faire reconnu dans la profession, son outil de production complémentaire et flexible permettait de s’adapter aux besoins des clients.
Découpée aux chalumeaux, l’usine sera vendue aux enchères dans les prochains jours.
Son matériel encore en état de marche et acquis au fil du temps, sera transformé en ferraille.
Les porteurs, les clients fidèles, les partenaires et les industriels du milieu qui ont soutenus le projet regrettent cet immense gâchis.
Fonderie Mayennaise est un exemple parmi tant d’autres de la désindustrialisation violente et silencieuse de notre époque.
« Le comité de pilotage remercie avec beaucoup d’émotion les partenaires, les conseils et les chefs d’entreprise qui se sont investis à ses côtés et qui ont cru dans l’avenir de la fonderie.
Etant originaire de la Mayenne, cela m’attriste profondément.
Je suis toujours aussi triste,lorsque je vois qu’une Fonderie ferme ses portes.
Elle est pas belle la vie d’un européen! nous pouvons crier tous ensemble,haut et fort,vive l’Europe.
Comme un air de déjà vu… La chute continue et semble ne pas s’arrêter et tout ça sciemment.
La prochaine vente aux enchères sera probablement celle de la Fonderie La Perseverance à Rocroi.Elle fut toute ma vie,mon bonheur,mes joies,mes peines.Sa fermeture laissera à jamais une cicatrice dans mon cœur.Elle a été liquidée le 17 avril 2015,depuis,il ne s’est jamais passé un jour sans que je pense à elle.C’est ma façon à moi de lui rendre hommage.
Vous auriez peut être du garder la main Danielle, elle serait peut être encore en activité
Triste constat de revoir encore presque 10 ans après la liquidation de la mienne en 2006 (fonderies de Meung sur Loire) que l’histoire n’est pas finie et que tout notre immense savoir faire technique acquis ne deviendra plus qu’un lointain souvenir … que nous n’aurons plus de fonderies en France à terme mais que nous serons peut-être le premier pays d’ Europe à avoir le plus grand nombre d’associations de groupes d’histoire du métier de la fonderie !…