Le prix unique survit seulement quand la loi l’exige (livres, passeports, tarifs réglementés de l’électricité) ou quand un industriel est assez puissant pour imposer ses prix (Apple).
Le prix fixe, lui, devient une rareté. De plus en plus souvent, le prix varie pour chaque acheteur, à chaque moment.
Nous entrons ici dans un monde nouveau.Le prix se détermine sur le marché, où se confrontent l’offre et la demande, où des utilités dissemblables se rencontrent et s’équilibrent. Mais le prix, aujourd’hui, est de plus en plus souvent différent pour chacun. Il ne marque plus tant un point d’équilibre collectif que le consentement individuel de chacun à payer.
Pour les économistes, c’est un changement radical. Mais si les forces du marché sont toujours présentes dans les mécanismes actuels, tout comme d’ailleurs le coût du travail, elles ne forgent plus les prix. Leur fabrication se produit individuellement lors du processus d’échange, après une longue interaction entre l’acheteur, le vendeur et les influenceurs.
Les statisticiens sont a priori mieux armés. Ils connaissent bien la notion de consentement à payer, qu’ils utilisent pour corriger les prix d’un ordinateur ou d’une voiture en intégrant la valeur de ses nouveaux équipements.La construction d’un indice de prix significatif va devenir un vrai casse-tête. Comment mesurer la hausse du prix du train ? Si beaucoup de voyageurs paient leur billet plus cher parce qu’ils l’achètent plus tard.
Pour les entreprises, enfin, le défi est d’une autre nature. Le meilleur moyen de déterminer le consentement à payer d’un client est d’accumuler le maximum de données sur lui, pour mieux le connaître et le prévoir. C’est là que réside la vraie puissance de Google, d’Amazon, de Facebook et d’autres géants américains : ils savent de plus en plus ce qui se passe dans nos têtes. Et les prochaines guerres des prix se gagneront dans les têtes plus que sur les marchés.
Apparemment les économistes ne mettent pas souvent les pieds dans les marchés, les brocantes, et tous les lieux où l’on vent et on achète de la main à la main