Après la prise de la ville de Douai en août 1914 par l’armée allemande, Michel Wibault peut observer l’aviation allemande installée sur le terrain de la Brayelle. Sa bonne pratique de la langue allemande et le peu de méfiance que suscite le jeune handicapé lui permettent de prendre de nombreuses notes. Par ailleurs, des amis de la famille Wibault reçoivent l’obligation de loger Anthony Fokker, de passage à Douai pour effectuer des démonstrations devant les aviateurs allemands. Le jeune passionné d’aviation en retire de précieux renseignements 5. Il décide de rejoindre la zone non-occupée de la France par la Suisse, pour mettre en pratique ce qu’il a appris.
Il arrive à Paris en mars 1917 et convainc le colonel Émile Dorand d’appuyer son projet d’avion de chasse, avec l’aide financière de son oncle maternel, accordée en décembre 1917. Un maquette testée dans le laboratoire aérodynamique Eiffel montre son potentiel. Il conçoit avec l’ingénieur Paul Boccaccio le Wibault-Boccaccio & Cie, doté d’un moteur Hispano-Suiza de 220 ch. L’avion réalise de brillants essais en 1918, avec une vitesse de pointe de 237 km/h et un plafond de 7 500 m. Ces réalisations assoient sa réputation mais la fin de la guerre interrompt les efforts sur ce prototype6.
Un pionnier de la construction métallique
Il fonde en 1919 son bureau d’études, la Société des Avions Michel Wibault. Des ateliers sont installés à Billancourt, où sont construits à partir de 1920 divers types d’avions monoplaces et biplaces de reconnaissance, de chasse et de bombardement.
Michel Wibault est un des promoteurs de la construction métallique intégrale en alliage léger à haute résistance7. Ces innovations sont appliquées en 1924 sur le Wibault 7C-1, chasseur monoplan à aile haute et haubans rigides. Vickers Ltd Aviation Department adopte les brevets Wibault de construction métallique dès 19258, utilisés sous la marque Vickers Wibault (en).
Michel Wibault s’associe en 1931 avec les Chantiers de Penhoët de Saint-Nazaire, dans la société Wibault-Penhoët. Il conçoit des trimoteurs de transport, peu coûteux et destinés à l’aviation commerciale française. Les Wibault 282T et Wibault 283T transportent douze passagers et sont mis en ligne par la compagnie Air France.
En 1937, le ministère de l’Air confie à Michel Wibault, dans le cadre de l’Arsenal de l’aéronautique, un marché de construction d’un quadrimoteur commercial, l’Air-Wibault. Cet avion doit transporter 72 passagers sur 2 ponts, à la vitesse de 310 km/h. Le projet est arrêté faute de moteur.
Les États-Unis et la France libre
Michel Wibault part aux États-Unis en 1940. Il participe à l’organisation de la France libre9, à la demande de Charles de Gaulle. Il travaille avec son ancien collaborateur et ingénieur en chef de la Republic Aviation Company, Alexander Kartveli10, à la création des XF-12 Rainbow (en) et Republic RC-3 Seabee (en)11.
L’après-guerre et le décollage vertical
Il crée après guerre un bureau d’études avec l’aide financière de la famille Rockefeller. Il dépose en 1954 un brevet de tuyère orientable pour un avion à décollage vertical12,11. Le décollage est assuré par quatre soufflantes orientables placées autour du centre de gravité de l’avion. La puissance est délivrée par un turbopropulseur Bristol Orion (en)13. Ce dernier est développé pour motoriser les projets du Bréguet Br.1010 Aptérion et du Gyroptère14. Il ne convainc pas les services officiels français mais soulève l’intérêt du Mutual Weapons Development Programme (MWDP) de l’OTAN, basé à Paris. Un rapport est transmis à Bristol Aero Engines (en). Avec un ingénieur de cette firme, Gordon Manns Lewis (en), ils adaptent ce concept et déposent un brevet de réacteur à poussée vectorielle en 1957. À partir du Bristol BE53 dérivé du brevet, Sidney Camm et son bureau d’études conçoivent le prototype Hawker Siddeley P.1127, qui vole en 1960.
Michel Wibault peut observer les progrès du concept qu’il a imaginé et meurt le 23 janvier 1963 dans le 16e arrondissement de Paris, avant la mise en service du Hawker Siddeley Harrier.
La Légion d’honneur lui a été décernée.
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quelle ascendance !!
ce qui explique pour partie ta brillante carrière
Brillante ? Certes je n’ai pas honte, mais surtout très fier d’avoir beaucoup d’amis.
Grâce à mes nombreuses rencontres, je pense avoir beaucoup appris.
Je réfléchis tjrs à la suite de ce blog.
Si vous avez une ou des idées??
Michel Wibault était le fils d’Achille Wibault le frère de mon grand père Eugène donc le cousin germain de mon père.
PIWI
Catherine Bargues ; J’ai énormément d’archives le concernant et concernant ses avions, ses brevets, etc.
cmg@d-d.fr